Il se mit à enseigner dans la synagogue

   QUATORZIEME DIMANCHE ORDINAIRE (B)

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc

 En ce temps-là, Jésus se rendit dans son lieu d’origine, et ses disciples le suivirent. 
 Le jour du sabbat, il se mit à enseigner dans la synagogue. De nombreux auditeurs, frappés d’étonnement, disaient : « D’où cela lui vient-il ? Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée, et ces grands miracles qui se réalisent par ses mains ?  N’est-il pas le charpentier, le fils de Marie, et le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas ici chez nous ? » Et ils étaient profondément choqués à son sujet. Jésus leur disait : « Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa parenté et sa maison. »  Et là il ne pouvait accomplir aucun miracle ; il guérit seulement quelques malades en leur imposant les mains. Et il s’étonna de leur manque de foi. Alors, Jésus parcourait les villages d’alentour en enseignant.

oOo

Qui est-il ?

Au cours de ces derniers dimanches, nous avons, à travers un certain nombre de gestes de Jésus, examiné un peu quel pouvait être le cheminement de la foi. D’ailleurs, c’est tout au long de l’Evangile de Marc, depuis la première page, que se pose la question de tous ceux qui ont approché Jésus : « Qui est-il ? »

            Progressivement, très lentement, les disciples, les fidèles vont commencer à donner un semblant de réponse. Il faudra arriver au milieu de l’Evangile pour que Pierre puisse répondre à Jésus : « Tu es le Messie », ce qui est un début de bonne réponse. Mais il faudra arriver à la dernière page de l’Evangile de Marc pour que soit donnée la bonne réponse à notre question. Et c’est un païen, le centurion romain, qui dira au pied de la croix : « Celui-ci est vraiment Fils de Dieu ».

La "non-foi"

            Voilà donc tout un cheminement. Or, ici, d’un seul coup, opposé au cheminement de la foi, on trouve la « non-foi ». Et elle vient des gens du village de Nazareth. Alors que les autres se sont posés une question ouverte : « Qui est-il ? C’est formidable ! Il dit des choses merveilleuses, il fait des miracles, il est même capable de commander aux forces de la nature... Qui est-il ? », les habitants de Nazareth, eux, commencent par dire : « Nous, on connaît ». C’est une réponse fermée. On connaît. Et ils sont capables de décrire le Jésus qu’ils connaissent : c’est le charpentier du village, on connaît bien toute sa famille. Ils pourraient ajouter : « C’est lui qui a refait mon toit, j’ai été à l’école avec lui... » Bref, il n’y a plus d’interrogation possible. Bien au contraire, la sagesse de Jésus, dans ses discours à la synagogue, les miracles dont ils ont entendu parler, tout cela devient pour eux une occasion de scandale. Le contraire du chemin de la foi. Le mot « scandale » est un mot hébreu qui veut dire : « quelque chose qui empêche de marcher, d’avancer », un bâton dans la roue. Jésus est un scandale pour ses concitoyens. Ils se ferment.

            Et tous les beaux gestes qu’il fait, toutes les belles paroles qu’il prononce les enferment dans un refus total. Les gens de Nazareth, à commencer par les membres de la propre famille de Jésus ! A la question : « Qui est Jésus ? », sa propre famille répondra : « C’est un illuminé, une moitié de fou. Il faut l’enfermer ». C’est dans l’Evangile.

Une affaire d'amour

            Alors se pose la question : Qu’est-ce qui fait qu’un homme fait normalement le cheminement de la foi et qu’un autre bute, par exemple, sur les miracles de Jésus ? Cela arrive aujourd’hui. Je ne sais plus qui a écrit : « Il y a des gens qui croient à cause des miracles. Moi, je peux dire que je crois malgré les miracles racontés dans l’Evangile ». Quel peut être le cheminement de la foi ? Je crois que c’est le contraire de : « Moi, je sais ». Nous avons tous un peu cette tentation de dire : « Moi, je sais. Jésus, je connais. Je sais tout de lui. J’ai été au catéchisme. J’ai tout appris. Je sais où il est né. Je sais même la date de sa mort. Je sais tout... et ça ne me sert à rien ». Eh oui, la foi, le questionnement perpétuel en nous (« mais qui est-il, ce Jésus ? ») ne peut être qu’une affaire d’amour, de désir. 

            Si je n’aime pas quelqu’un que je connais, je peux le définir d’un mot : par son métier, ou par tel trait de caractère. Mais si j’aime quelqu’un, je suis porté à lui dire sans cesse : « Je veux tout connaître de toi. Et tu me surprendras toujours. Et j’aurai toujours quelque chose à découvrir de toi ». C’est cela, l’amour. C’est cela, le chemin de la foi.

Une recherche

            Nous voyons donc comment nous situer aujourd’hui. L’interrogation, c’est vraiment la démarche de la foi. Je suis persuadé que, croyants ou non, les gens qui croient savoir et qui ont décidé une fois pour toutes que « c’était comme cela » n’ont pas vraiment la foi. La foi véritable est celle qui est toujours à la recherche d’une connaissance. Pas d’une connaissance intellectuelle, livresque, mais d’une connaissance de la personne de Jésus, homme véritable et fils de Dieu, dans une rencontre. Au fond, à la question : « Qui est Jésus ? », les gens de Nazareth ont répondu : « C’est un homme comme nous ». Il y avait le « comme nous » de trop. A la question : « D’où vient cette sagesse ? », ils ont répondu : « Cela, on n’y croit pas ».

            Cette remarque est valable pour toute rencontre humaine. Si on était capable de s’ouvrir à toute personne, à un enfant, à un vieillard, et de chercher en lui cette étincelle de divinité (« elle est, il est fils de Dieu »), ça changerait quelque chose à toutes nos relations humaines. De même, pour le regard que nous portons sur l’Eglise. Un regard de foi ne se contentera pas d’une série d’affirmations plus ou moins approximatives. Il visera à entrer dans le mystère de l’existence même de l’Eglise : à la fois société humaine, avec ses déficiences, et « Corps du Christ ».

            Je vous laisse ces quelques réflexions. En priant pour que votre attitude de chrétiens consiste à ne jamais avoir de certitudes trop enracinées. Elles empêchent de connaître et de rencontrer. Elles empêchent d’aimer.

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