16e DIMANCHE DANS L'ANNEE C



Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

    En ce temps-là,
    Jésus entra dans un village.
Une femme nommée Marthe le reçut.
    Elle avait une sœur appelée Marie
qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.
    Quant à Marthe, elle était accaparée
par les multiples occupations du service.
Elle intervint et dit :
« Seigneur, cela ne te fait rien
que ma sœur m’ait laissé faire seule le service ?
Dis-lui donc de m’aider. »
    Le Seigneur lui répondit :
« Marthe, Marthe, tu te donnes du souci
et tu t’agites pour bien des choses.
    Une seule est nécessaire.
Marie a choisi la meilleure part,
elle ne lui sera pas enlevée. »



A première vue, la remarque que Jésus fait à Marthe est assez choquante. Il y a un malentendu, c’est certain. Il faut se mettre à la place de cette femme. Imaginons un instant qu’elle ait fait comme sa soeur. Jésus entre, vient s’asseoir, et Marthe, comme Marie, s’assied aux pieds du Maître et l’écoute. Les heures passent, la nuit vient...Sans doute, à un moment donné, Jésus aurait dit : « Bon ! Cette fois-ci, ça va bien, mais il faut manger ». Et il n’y avait rien de prêt.
 
Elle est bien dans sa condition féminine, surtout à cette époque-là, cette Marthe sur qui repose toute la responsabilité du service. A cette époque-là...et encore de nos jours, souvent. Marthe, comme la plupart des femmes, prend sa grosse part des soucis ménagers, des soucis de l’accueil, quand il y a un visiteur. Vous le savez bien, vous, mesdames, qui êtes si souvent obligées de penser à tout, et surtout quand vous recevez quelqu’un. Aussi, on s’imaginerait plus facilement le mari qui discute avec l’hôte, et la femme qui est à la cuisine. Mais ici, il y a deux femmes, et l’une ne fait rien. Elle est assise, elle écoute. Et c’est elle qui est félicitée par Jésus. Qu’est-ce que cela veut dire ?
 
Pour essayer de comprendre la réflexion de Jésus, on va retourner au chêne de Mambré, auprès de notre ami Abraham. Vous avez entendu cette belle histoire. C’est l’heure de la sieste. Abraham fait sa sieste quand arrive un mystérieux visiteur. Avez-vous remarqué comment, tout au long de ce récit, par moments on parle d’une, puis, à d’autres moments, de plusieurs personnes. D’abord « le Seigneur apparut », puis, ils sont trois. Abraham, selon les beaux rites de l’hospitalité chez les nomades, se met à courir. C’est inhabituel chez un oriental. Il y a deux fois le mot « courir ». Il va trouver sa femme et lui dit : « Vite ». Il faut faire vite. Cela, c’est le préambule. Il y a autre chose. Dès que ces trois hommes sont assis au pied du chêne, Abraham se tient debout. Et cette histoire de trois et un, cela veut peut-être dire qu’Abraham a su reconnaître en la personne de ces visiteurs, la présence de Dieu. Et cette proximité de Dieu va être pour Abraham réponse à son attente, au désir le plus profond de sa vie. Ce pauvre homme, vieux, n’a pas d’enfant. Or, voilà que cet accueil, qui ne consiste pas seulement à offrir, à donner, mais à recevoir la personne de l’hôte, en l’accueillant en soi, cet accueil va susciter la réponse de Dieu : « Ta femme Sara va avoir un enfant ».
 
Maintenant nous pouvons revenir à Marthe et à Marie. Marie est comme Abraham. Elle est celle qui a su reconnaître dans cet homme Jésus qui entre chez elle la Parole de Dieu, Dieu lui-même présent. Pour Marthe qui s’agite, ce Jésus est un homme, un prophète, quelqu’un qui fait des miracles. Sûrement c’est un grand homme. Marthe est très honorée et elle ne voudrait pas qu’il y ait la moindre petite faille dans le service de l’hospitalité. Elle va donc « mettre les petits plats dans les grands ». C’est alors que Jésus lui dit : « Marthe, tu t’inquiètes et tu t’agites, mais ce n’est pas cela qui est premier ». Pour Marie, au contraire, ce qui est premier, c’est que celui-là, on n’est pas là d’abord pour le servir, pour faire des choses pour lui. On est là d’abord pour l’écouter. C’est cela qui est premier. C’est cela qui compte. Elle a dû reconnaître dans ce Jésus Dieu-fait-homme, Parole de Dieu incarnée.
 

Cet épisode de l’évangile peut nous aider à mettre au point notre existence chrétienne. Depuis plusieurs années, l’Eglise a insisté auprès des chrétiens pour qu’ils deviennent responsables, non seulement dans l’Eglise, mais dans le monde. Responsables de la mission. Responsables pour aller aux autres, pour être au service de leurs frères, dans toutes sortes de mouvements, d’oeuvres nécessaires, depuis la mission en terres lointaines jusqu’à l’Action Catholique, jusqu’au service du Tiers-Monde, etc...Il y a tout cela : un effort considérable est demandé au peuple chrétien. C’est vrai. C’est normal.

 
Et voilà que Jésus nous redit aujourd’hui : Attention ! Ce n’est pas cela qui est primordial. Si vous mettez en premier le souci de la mission, y compris celui de faire un monde plus juste, plus fraternel, un monde de paix...bref, toute l’action militante des chrétiens, tout cela n’est pas premier. Vous risquez de vivre dans l’agitation : « Tu t’inquiètes et tu t’agites »...Vous risquez de vivre dans l’agitation si vous ne mettez pas avant cela l’écoute de la Parole de Dieu. Cela peut nous choquer. Jésus ne nous dit pas que l’action missionnaire n’est pas nécessaire. Il dit même que c’est indispensable, le service des frères, le service des hommes. Mais avant, il faut d’abord se mettre à l’écoute de la Parole de Dieu. Dieu merci, les chrétiens le savent bien. Les militants les premiers. Voir l’insistance que l’on met aujourd’hui sur l’étude de la Bible, l’effort que font les mouvements et les paroisses pour des retraites, des récollections où l’on prend le temps d’écouter la Parole, tout le travail, ici et là, pour une formation biblique du peuple chrétien. Tout cela est la nécessité première. Elle passe avant tout. Grâce à cette lumière, vous découvrirez bien vite comment vous devez être serviteurs des hommes, comment vous devez travailler à faire un monde meilleur.
 
En ce temps de vacances, c’est important de nous le rappeler. Le reste de l’année, nous sommes tellement pris ! On court toujours. Or, voici qu’on s’arrête pour quelques semaines. Essayons donc de prendre le temps qui nous manque ordinairement pour renverser la vapeur, pour ne plus « mettre la charrue avant les bœufs ». Prenons le temps d’ouvrir la Bible, ou l’Evangile. Une phrase, un mot qu’on laisserait pénétrer en nous peut changer toute une vie.
 
Oui, la vraie qualité de l’accueil, c’est celle-là : s’arrêter, en apparence ne plus rien faire, mais déguster cette Parole dont le Christ nous nourrit de multiples façons.

oOo

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Dernière mise à jour :
4 juillet 2016
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