...comme à l'époque de Noé

       PREMIER DIMANCHE DE L’AVENT (A)

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 24, 37-44 

Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « L’avènement du Fils de l’homme ressemblera à ce qui s’est passé à l’époque de Noé. A cette époque, avant le déluge, on mangeait, on buvait, on se mariait, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche. Les gens ne se sont doutés de rien, jusqu’au déluge qui les a tous engloutis : tel sera aussi l’avènement du Fils de l’homme. Deux hommes seront aux champs : l’un est pris, l’autre est laissé. Deux femmes seront au moulin : l’une est prise, l’autre laissée. Veillez donc, car vous ne connaissez pas le jour où votre Seigneur viendra. Vous le savez bien: si le maître de maison avait su à quelle heure de la nuit le voleur viendrait, il aurait veillé et n’aurait pas laissé percer le mur de sa maison. Tenez-vous prêts, vous aussi : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra ».

oOo

Bizarre

Remettons d'abord ce petit passage d'évangile dans son contexte. Nous sommes à Jérusalem, dans les dernières semaines avant l'arrestation de Jésus, et la contestation se fait de plus en plus âpre. Jésus vient de sortir du Temple, et ses disciples lui font remarquer la splendeur de cet édifice, qui n'est d'ailleurs pas encore terminé, mais qui déjà fait la fierté de tour le peuple. Jésus leur répond de manière brève : de tout cela il ne restera pas pierre sur pierre. D'où l’interrogation des disciples, quelques minutes plus tard, lorsqu'ils se retrouvent seuls avec lui au mont des Oliviers : « Dis-nous quand cela arrivera, et quel sera le signe de ton avènement et de la fin du monde ? »

Bizarre, cette manière de lier, dans leur interrogation, en même temps que la destruction d'un monument célèbre, l'idée de l'avènement de Jésus et la perspective de la fin du monde ! De quelle sorte d'avènement s'agit-il ? Et pourquoi envisager, en cette occasion, avènement du Christ et fin du monde ?

La fin d'un monde

Je crois qu'il faut, pour bien comprendre de quoi il s'agit, se rappeler que le peuple juif de l'époque vivait depuis des générations dans l'attente d'un messie, et que les disciples partageaient la même attente. Simplement, pour eux, le messie attendu leur était connu : ils pensaient que c'était Jésus. Mais, comme l'ensemble de la population, ils mettaient sous cette personne du messie toute leur espérance humaine, terrestre, politique. Jésus n'avait-il pas, dès le début, prêché l'avènement du Royaume de Dieu. Un Royaume qu'ils imaginaient comme une révolution nationaliste, et en particulier comme le jour de l'indépendance : terminée l'occupation romaine, si dure et si pesante ! Ce serait alors l'avènement - la venue comme roi, l'Avent – du Roi-Messie, Jésus. Dans leur esprit, il s'agirait d'un extraordinaire bouleversement. La fin d'un monde et la naissance d'un monde nouveau.

Mais quand ?

Lorsque Matthieu écrit son évangile, nous sommes une cinquantaine d'années après la mort et la résurrection du Christ. Pendant ces cinquante ans, les disciples de Jésus ont attendu l'avènement tant espéré de Jésus, et rien ne s'est produit. Au début, l'attente était très vive, et l'on pensait la venue du Roi-Messie comme imminente. Jérusalem et le Temple ont été totalement détruits en 70, mais ce qui devait en être la conséquence logique, dans l'esprit de la première génération, l’avènement de Jésus et le monde nouveau qu'il devait instaurer ne se sont pas produits. Matthieu adresse son évangile aux chrétiens qui ont fui, d'abord à Pella, en Syrie, puis sont venus s'installer à Antioche, le plus grand port de la Méditerranée. Eux aussi continuent à se demander, comme les disciples contemporains de Jésus, quand leur espérance se réalisera. Il y a eu déjà la destruction du Temple. Quand donc se produira la suite tant attendue, l'avènement du Christ et la fin du monde actuel ? D'où le petit passage d'évangile que nous venons de lire.

Pour nous aujourd'hui

Jésus ne s'adresse pas seulement aux disciples de l'année 30, mais aussi à ceux d'Antioche dans les années 80... et à nous aujourd'hui, en ce premier dimanche de l'Avent.

Pas pour nous faire une révélation du jour de sa venue et de la fin du monde, mais pour nous recommander d'être, dans la conjoncture actuelle, des chrétiens vigilants, des hommes qui tiennent debout dans l'adversité. Certains qu'il jour, le Seigneur reviendra. Mais en même temps ne cherchant pas à savoir quand ce sera.

Mais tout d'abord, ne faut-il pas nous poser la question principale : est-ce que nous sommes des gens qui vivent dans l'attente, dans l'espérance de la venue du Seigneur ? La fin du monde, nous pensons, certes, que c'est une éventualité plausible. Mais quand ? Quant à la venue du Seigneur, je me demande si ce n'est pas simplement du bout des lèvres, sans trop y croire, que nous redisons dans notre Profession de Foi qu'« il reviendra dans la gloire pour juger les vivants et les morts », et que nous lui chantons " nous attendons ta venue dans la gloire ! " ?

Toujours prêts

Et donc, ne faut-il pas nous demander ce que signifie pour nous le temps de l'Avent ? Le mot veut dire, vous le savez, avènement. De quel avènement s'agit-il ? Et comment nous y préparer ? Jésus décrit cet événement comme subit, imprévisible, inattendu, surprenant, et il nous invite à nous tenir prêts. A être vigilants comme le maître de maison qui ne se laissera pas surprendre par l'irruption d'un voleur.

Saint Paul, de même, nous invite à ne pas nous laisser endormir. « L'heure est venue de sortir de votre sommeil. » Ne vous laissez pas endormir ! Tant de choses, aujourd'hui, sont faites pour nous endormir, à commencer par toutes les techniques de propagande, de publicité, qui nous endorment à bon compte.

Restez éveillés ! C'est-à-dire sachez en toutes circonstances garder votre esprit critique et votre liberté de penser, de choisir de décider. Il nous est arrivé à tous de rencontrer parfois un gosse qui pose tellement de questions, qui s'intéresse à tant de choses, qu'on se dit entre nous, adultes : « Ce qu'il est éveillé, ce petit ! » Qu'il en soit de même de nous. Alors notre Avent sera le temps de l'attente, du désir, de cette préparation spirituelle qui nous fera crier « Marana Tha », oh oui, viens, Seigneur Jésus.

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