Des ouvriers pour la moisson
Voici les noms des Douze
Jésus, voyant les foules, eut pitié d'elles parce qu'elles étaient fatiguées et abattues comme des brebis sans berger. Il dit alors à ses disciples : " La moisson est abondante, et les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d'envoyer des ouvriers pour sa moisson. " Alors Jésus appela ses douze disciples et leur donna le pouvoir d'expulser les esprits mauvais et de guérir toute maladie et toute infirmité. Voici les noms des douze Apôtres : le premier, Simon, appelé Pierre, et André son frère ; Jacques, fils de Zébédée, et Jean son frère ; Philippe et Barthélémy ; Thomas et Matthieu, le publicain ; Jacques, fils d'Alphée, et Thaddée ; Simon le Zélote et Judas Iscariote, celui-là même qui le livra. Ces douze, Jésus les envoya en mission avec les instructions suivantes : " N'allez pas chez les païens et n'entrez dans aucune ville des Samaritains. Allez vers les brebis perdues de la maison d'Israël. Sur votre route, proclamez que le Royaume des cieux est là. Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, chassez les démons. Vous avez reçu gratuitement : donnez gratuitement. "
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 9, 36 - 10, 8 11e DIMANCHE ORDINAIRE (A) oOo Dieu intervient
" Mais Dieu, qu'est-ce qu'il fait ? " Cette question, je pense que la plupart d'entre nous se la sont posée. En toutes circonstances, mais plus particulièrement sans doute quand tout va mal, dans notre vie personnelle ou dans l'histoire de notre temps. Est-ce que Dieu se désintéresse de notre quotidien et de notre avenir ? Est-ce qu'il reste indifférent au malheur des peuples ? En d'autres termes : notre Dieu, après avoir créé le monde, le laisse-t-il tourner sans jamais intervenir ? Et s'il intervient (ce qui n'est pas visible à l'œil nu) de quelle manière le fait-il ? A toutes ces questions, les trois lectures de la liturgie de ce dimanche répondent, chacune à leur manière, en déclarant que Dieu intervient dans l'histoire de notre humanité. Pour toute la Bible, c'est un fait indiscutable. Mais, ajoute-t-elle, il n'intervient pas directement.
Le destin d'Israël
Prenons le cas d'Israël : c'est par ce petit peuple que Dieu va agir dans le monde. Voilà ce que toute la Bible proclame. Pourquoi Israël ? Je n'en sais rien, mais c'est un fait que, tout au long de l'histoire, et jusqu'à aujourd'hui, on se trouve en présence d'un petit peuple " différent ", qui a survécu à tous les aléas d'une histoire souvent tragique, et cela pendant plus de trois millénaires. Fait unique dans l'histoire, à ma connaissance. Au point de départ, un homme qui médite sur une montagne ; des tribus, ramassis de pauvres gens, qui se libèrent de l'esclavage de leurs maîtres égyptiens, qui ensuite se structurent selon une Loi qui fait d'eux un peuple à part. " Vous serez, leur dit Dieu, mon domaine particulier parmi tous les peuples - car toute la terre m'appartient - et vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte. " " Prêtres ", c'est-à-dire chargés de faire le lien entre Dieu et les autres peuples ; et " saints ", c'est-à-dire, comme je l'ai souvent répété, " différents de… ". Différents des autres peuples. Peuple marqué depuis le premier jour de son existence, et aujourd'hui encore, par ses différences, avec son destin bizarre et exceptionnel, unique. Témoins de la puissance de Dieu qui sans cesse fait passer de l'esclavage à la liberté. A une condition : que ce peuple choisi respecte les termes de l'Alliance que Dieu a faite avec lui.
Dieu délègue
" Jésus, voyant cette foule, eut pitié d'elle. " Il est en train de faire la tournée des villes et des villages de Galilée. Il a commencé par enseigner - car l'ignorance est le pire malheur, puis il a proclamé la Bonne nouvelle et guéri des malades. Il s'est rendu compte, directement, de la misère de ces pauvres gens. Il s'agit maintenant de " déléguer ". Déléguer, voilà un des maîtres mots de toute l'Écriture. Dieu délègue. En bon éducateur, au point de départ, il confie la responsabilité de toute la création à l'homme et à la femme. Ensuite, il charge le peuple choisi d'une mission ; puis, au sein de ce peuple, il envoie son propre Fils, pour intensifier l'annonce de la Bonne Nouvelle, d'abord par des signes : Jésus, l'Envoyé du Père, est vainqueur et le mal a reçu un coup mortel. En Jésus, Dieu lui-même vient guérir l'humanité. Ensuite, Jésus lui-même va déléguer. Parmi ses nombreux disciples - il y en avait sans doute quelques centaines à ce moment-là, Jésus va choisir douze hommes. Sur quels critères les a-t-il choisis ? Je ne sais. En tout cas, parmi eux, le premier, Simon-Pierre, sera celui qui le reniera et Judas, celui qui le vendra. Ces douze hommes ne brillent ni par leur origine sociale, ni par leur compétence. Mais Jésus leur fait confiance. Il leur confie la mission d'annoncer, eux aussi par des signes, la Bonne Nouvelle de la tendresse de Dieu et la proximité de son Règne. Les " pouvoirs " dont ils sont investis sont décrits dans l'Évangile en termes imagés. De quoi s'agit-il ? Essentiellement d'annoncer aux hommes que Dieu-Amour nous invite, nous aussi à être amour. Que la vérité de l'homme est amour et que l'homme vaut ce que valent ses entreprises pour aider, guérir, soulager, libérer. C'est par les actes de ces hommes pris ensemble, que l'évangile nomme " Apôtres " (c'est-à-dire " envoyés ", délégués officiels), que l'on peut reconnaître l'intervention de Dieu dans l'histoire.
Libérer l'amour
Au centre de tous ces processus de " délégations ", il y a Jésus. Il est l'intervention de Dieu. De cette intervention tout découle. Dieu intervient en personne, en la personne de Jésus, par le biais de la liberté de l'homme-Jésus, celui " qui est passé parmi nous en faisant le bien ", celui qui a donné sa vie humaine par amour.
En conclusion, et pour résumer notre propos : Dieu délègue. Il agit dans l'histoire par le jeu des libertés humaines. Ce qui ne veut pas dire qu'il les télécommande (ce ne seraient plus des libertés). Dieu est la source de l'amour qu'il y a en nous. Quand nous choisissons de libérer cet amour, nous faisons agir Dieu. Il s'est livré pour nous. Nous avons le pouvoir de le tuer ou de le " relâcher ", de le faire vivre. Nous avons le pouvoir de faire en ce monde l'œuvre de Dieu. N'ayons pas de complexes : nous savons, nous croyants, que l'homme a reçu le pouvoir d'aimer. Et que l'amour aura finalement le dessus.