Pour que le monde soit sauvé
Dieu a tant aimé le monde !
Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. Celui qui croit en lui échappe au jugement, mais celui qui ne veut pas croire est déjà jugé, parce qu'il n'a pas cru au nom du Fils unique de Dieu.
Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 3, 16-18 LA SAINTE TRINITE (A) oOo Une carte de visite
Nous avons lu aujourd'hui, en première lecture, un passage du livre de l'Exode où Dieu, en quelque sorte, présente sa carte de visite à Moïse, sur la montagne du Sinaï. Il se présente, à l'aube de l'histoire, de notre histoire, au XIIIe siècle avant Jésus Christ. Il se présente comme un Dieu " tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d'amour et de fidélité. " Je dis souvent que nous avons, dans notre langage d'Occidentaux, édulcoré le sens des mots, et qu'il faudrait, non pas apprendre l'hébreu, mais retrouver la force des mots hébreux. Parce que l'hébreu est une langue concrète, qui n'a pas de mots abstraits comme tendre, miséricordieux, mais seulement des mots concrets, faisant appel à l'expérience humaine. Ainsi, le mot que nous traduisons par " tendre ", évoque en hébreu le sein maternel. Dieu est tendre comme une maman qui donne le sein à son bébé. Cela change nos idées toutes faites sur Dieu. Il est " miséricordieux ", un mot qui a perdu aujourd'hui de sa force, et qui, en hébreu, désigne celui qui ne supporte pas de voir quelqu'un malheureux. De même, le mot " amour ", qu'on met à toutes les sauces aujourd'hui, dit simplement, en hébreu, l'attirance sexuelle d'un homme pour une femme. Voilà qui est Dieu. Et le mot " fidèle " évoque le rocher. Dieu est donc totalement différent de ce que nous pouvons imaginer. Il n'est pas une espèce de Zeus maniant la foudre et le tonnerre. Voilà le Dieu qui se présente à nous.
Croire est un voyage
Vous avez entendu également, dans l'évangile, Jésus qui présente son Père à Nicodème, un notable juif qui est venu le voir de nuit. Il lui dit à brûle-pourpoint : " Dieu a tant aimé le monde qu'il lui a donné son fils. " Eh bien, voilà le Dieu en qui nous croyons. Et cela vaut le coup de dire " Je crois " à ce Dieu-là, de mettre notre confiance en lui, pas en un autre, pas en n'importe quoi.
J'ai toujours peur quand j'entends dire : " Celui-là, c'est un grand croyant ", ou quand on dit : " Moi, je ne crois en rien." J'ai toujours envie de dire : " En qui croyez-vous ? Et qu'est-ce que ça veut dire, croire ? " Il y a un beau mot de Pablo Neruda, le poète chilien, qui dit : " Aimer est un voyage. " J'ai envie de reprendre ce mot pour dire : " Croire est un voyage. " Un long voyage que j'ai commencé quand j'étais tout petit. Comme vous tous, je me suis posé des questions : " Est-ce qu'on ne me trompe pas ? Est-ce que tout cela n'est pas illusion ? " J'ai pensé cela, quand j'étais adolescent. Puis après, il y a eu tout un cheminement, dont je connais les étapes, pour mon cas personnel. Et aujourd'hui, arrivé à mon âge, je me dis : " C'est formidable : Il a toujours été à côté de moi ! " Vous avez entendu, dans la première lecture, la Bible qui nous dit que Dieu est venu se placer à côté de Moïse. C'est encore un langage imagé pour dire qu'il marche avec nous, qu'il est le compagnon intime de toute notre existence.
Il marche avec toi
Alors, s'il marche avec toi, tu vas essayer de lui ressembler, pour deux choses. Et d'abord, en aimant le monde, comme lui. Cela, c'est extraordinaire, dans une époque comme la nôtre où beaucoup de gens n'aiment pas vraiment ce monde, en ont peur. La peur, c'est le contraire de la foi. Les gens ont peur de l'avenir, peur de la vie, peur même de donner la vie. Il y a quelques jours encore, au cours d'une conversation entre amis, on se disait : " Vous vous rappelez autrefois, il y avait telle chose, c'était bon, c'était bien ! " Évoquer le passé, c'est normal, regretter " le bon vieux temps ", c'est malsain. On est aujourd'hui et il s'agit de vivre et d'apprécier l'aujourd'hui de Dieu, " ce jour que Dieu nous donne ". Car Dieu aime ce monde d'aujourd'hui, tel qu'il est, avec ses malfaçons : la violence, la guerre, les injustices, les pays de la faim, les peuples qui souffrent de l'absence de liberté, bref, le péché sous toutes ses formes. Et il m'aime moi, avec toutes mes imperfections, tel que je suis, avec mon péché.
Mais s'il m'aime tel que je suis, il m'aime donc, il aime ce monde, avec toutes les possibilités à faire éclore : avec le travail des savants et l'effort des hommes de paix, avec toute l'évolution de la technique qui nous rend la vie plus facile. Dieu nous répète chaque jour : " Aime-le donc, ce monde ! N'aie pas peur d'y vivre. Vis-le bien. " Et le vivre bien, ce n'est pas seulement dire qu'on l'aime et s'y trouver à l'aise, c'est aussi y travailler, avec Dieu, comme Dieu. Parce que " Dieu a besoin des hommes ". Ce monde est inachevé, et il faut le faire progresser.
Qu'est-ce que cela veut dire, concrètement ? Souvent, hélas, les parents disent à leurs enfants : " C'est pour toi que tu travailles ! " Eh bien, ce n'est pas vrai. C'est pour le monde, c'est pour l'humanité tout entière que je travaille. C'est pour que ce monde réussisse. Ce doit être là notre visée commune. Que tu sois très intelligent ou moins intelligent. La maman qui me dit qu'elle est " sans profession " est aussi importante, pour la construction du monde, que le plus grand savant. Là où tu es, à ta place, il s'agit de donner beaucoup aux autres. Tous, qui que nous soyons, riches ou pauvres, malins ou non, sans distinctions d'opinions, si nous croyons un tout petit peu, nous travaillerons avec Jésus pour que ce monde réussisse. Dire " Je crois ", ce n'est pas plus que cela : faire un petit pas, une petite démarche, souvent renouvelée, sachant que le Christ sera toujours à nos côtés pour l'édification d'un monde plus réussi.
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