THEOLOGIE "POUR LES NULS"

CETTE ANNEE : LE BAPTEME.

 

5e séquence : Mort et Résurrection.

(Mai 2001)

Ne croyez pas que je sois loin de mon sujet. Certes, je parle beaucoup du "vrai" baptême de Jésus. Mais c'est pour éclairer la signification de notre propre baptême. Ce mois-ci encore, il s'agira donc de Jésus, que Dieu a fait "asseoir à sa droite", comme dit le psaume. Ensuite seulement, nous pourrons mieux comprendre les enjeux du baptême pour un chrétien.

Il est ressuscité des morts le troisième jour.

Je terminais mes propos, le mois dernier, en vous disant qu'on ne plonge pas pour rester au fond de l'eau, mais pour remonter à la surface, pour "re-surgir". Jésus a fait le plongeon dans la mort, mais pas pour y rester. Notre foi chrétienne est centrée sur cet événement : Jésus, qui est mort sur une croix "a été enseveli, est descendu aux enfers (ce qui signifie simplement qu'il est réellement mort), est ressuscité des morts le troisième jour, est monté aux cieux, est assis à la droite de Dieu."
Ses disciples, qui avaient d'abord marché avec lui avec une foi un peu tâtonnante, que l'arrestation du Maître avait fait chanceler, vont être ensuite "enseignés" par le Christ ressuscité (rappelez-vous les disciples d'Emmaüs, et également Luc 24, 44-45) : il leur apprend - il nous apprend - à lire sa mort et sa résurrection. C'est lui qui nous enseigne la véritable signification de sa mort-résurrection, à la lumière des Écritures. Pour les chrétiens, Pâques est le commencement et le point de repère de la foi. Là, tout prend son sens et sa place.

C'est Dieu qui intervient.

Paul, écrivant aux Romains, définit la Bonne Nouvelle qu'il annonce : "Cette Bonne Nouvelle de Dieu...concerne son Fils, issu selon la chair de la lignée de David, établi, selon l'Esprit Saint, Fils de Dieu par sa résurrection...Jésus Christ notre Seigneur." Donc, deux étapes dans l'existence de Jésus : avant Pâques, avec tout le réalisme de l'incarnation et de ses racines juives, et après Pâques, où Jésus devient pleinement Christ et Seigneur par sa résurrection. Et tout cela à l'initiative de Dieu, le Père. C'est lui qui ressuscite et qui glorifie son Fils. Il intervient pour son Fils, il témoigne en sa faveur. Il casse le jugement prétendument rendu en son nom. Et par là même, il authentifie toute l'existence de Jésus. Et dès que l'Église va prêcher la résurrection, ce sera en opposition au procès et à la croix : "Vous l'avez mis à mort, mais Dieu l'a ressuscité".

 

Premier type de langage.

Or, les premiers chrétiens n'avaient pas de mots pour dire cette réalité totalement nouvelle et inouïe : un mort que Dieu a ressuscité. Et il restera toujours un décalage entre les mots qu'ils ont employés et la réalité. On peut relever trois types de langage. Premièrement, le vocabulaire de "résurrection". Les deux verbes grecs utilisés peuvent se traduire par "se lever" et "s'éveiller". Pour un bon juif du temps de Jésus, le mot signifie plus que l'expérience quotidienne de l'homme qui se lève, qui sort du sommeil ; il évoque une espérance. Espérance de la résurrection à la fin des temps partagée par une partie de la population, espérance qu'exprime Marthe, la sœur de Lazare, quand elle dit : "Je crois qu'il ressuscitera au dernier jour".. Mais transposé dans une culture grecque, le mot résurrection fait scandale : il est impensable d'imaginer qu'un corps puisse revenir à la vie. Or jamais les chrétiens ne chercheront à atténuer ce scandale. Au contraire, ils privilégieront ce langage "se réveiller, se lever" pour souligner le réalisme de la résurrection de Jésus. Il ne s'agit pas d'une quelconque apothéose spirituelle, d'une survie glorieuse dans la mémoire collective, ni même la simple immortalité de l'âme chère aux philosophes grecs, mais bien l'acte de Dieu qui rend la vie, une vie qui concerne toutes les dimensions de notre personne, corps et âme.

"Il est vivant".

Deuxième type de langage, le langage "vie" : Christ est vivant et il nous fait vivre. Dire que le Christ est ressuscité évoque un événement du passé, mais dire qu'il est vivant souligne l'actualité de cet événement. Ce n'est certainement pas un hasard si ce langage est très largement utilisé dans les catéchèses récentes. Il a l'avantage de mettre en valeur l'aujourd'hui de la résurrection. Mais il ne suffit pas, lui non plus, à dire à lui seul la résurrection de Jésus, car il n'exprime pas tout ce qu'a de nouveau, de neuf, cette "vie" inaugurée par la résurrection. C'est pourquoi il faudrait restaurer un troisième type de langage, le langage "exaltation".

"Dieu l'a exalté".

C'est ce type de langage, utilisé dès l'origine, dont nous avons le plus beau témoignage dans l'hymne ancien, repris par saint Paul dans la Lettre au Philippiens (2, 6-11) "Lui qui était de condition divine, (...) il s'est dépouillé, prenant la condition d'esclave (...) il s'est abaissé, devenant obéissant jusqu'à la mort, à la mort sur une croix. C'est pourquoi Dieu l'a souverainement exalté..." Ici éclate plus que tout l'initiative de Dieu, à la suite du "plongeon".
La Passion, la mort, c'était le geste de Jésus qui s'en remet à son Père, c'était la vie risquée jusqu'au bout, c'était toute la vie de Jésus comme un cri filial. La résurrection est alors comme la réponse du Père : libération de la mort, intronisation auprès du Père. En Jésus, un homme est maintenant dans la gloire de Dieu. Il ne s'agit pas seulement du retour à la vie de Jésus de Nazareth. Il s'agit d'une pleine participation de cet homme Jésus, au terme de son existence filiale, à la gloire même de Dieu.


Par l'Esprit Saint.

 

 

 

 

 

Reprenons le début de la Lettre aux Romains. Paul déclare qu'il annonce "la Bonne Nouvelle de Dieu concernant son Fils, issu selon la chair de la lignée de David, établi, selon l'Esprit Saint, Fils de Dieu...". Dans le même sens, la Première lettre de Pierre parle de Jésus, "lui, mis à mort selon la chair, il a été rendu à la vie par l'Esprit" (1P 3, 18). Le même Pierre, au matin de la Pentecôte, annonçait la résurrection de Jésus en ces termes : "Ce Jésus, Dieu l'a ressuscité, nous en sommes témoins. Exalté par la droite de Dieu, il a donc reçu du Père l'Esprit Saint promis et il l'a répandu, comme vous le voyez." Conformément à sa promesse, Jésus ressuscité nous communique son Esprit Saint. L'Esprit que nous recevons est en nous comme le rayonnement, la contagion de la résurrection. Il est en nous promesse de vie, puissance de vie, jusque dans nos corps mortels : "Et si l'Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d'entre les morts habite en vous, Celui qui a ressuscité Jésus Christ d'entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels, par son Esprit qui habite en vous." (Romains 8, 11)
Ce qui est advenu à Jésus dans sa résurrection nous dit que lorsqu'un homme va jusqu'au bout de l'homme, qu'il vit sa condition d'homme comme une liberté qui se reçoit du Père et qui s'accomplit dans un total don de soi, il entre dans le dynamisme même de Dieu. Il entre, comme fils, en communion avec le Dieu de vie, il devient une création nouvelle.
Ca y est, vous commencez à comprendre la grandeur du baptême, cette fois, non ?

Le mois prochain, nous pourrons donc revenir à notre propre condition de baptisés, à la lumière du "baptême" de Jésus que nous avons évoqué durant ces deux derniers mois. A bientôt.