L'Esprit Saint viendra sur toi et te couvrira de son ombre
Arche d'alliance
L
’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée appelée Nazareth, à une jeune fille, accordée en mariage à un homme de la maison de David, appelé Joseph ; et le nom de la jeune fille était Marie. L’Ange entra chez elle et dit : « Je te salue, Comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi. » A cette parole, elle fut toute bouleversée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation. L’Ange lui dit alors : « Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand, il sera appelé fils du Très-Haut ; le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; il régnera pour toujours sur la maison de Jacob, et son règne n’aura pas de fin. » Marie dit à l’Ange : « Comment cela va-t-il se faire, puisque je suis vierge ? » L’Ange lui répondit : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c’est pourquoi celui qui va naître sera saint, et il sera appelé Fils de Dieu. Et voici qu’Élisabeth, ta cousine, a conçu, elle aussi, un fils dans sa vieillesse et elle en est à son sixième mois, alors qu’on l’appelait « la femme stérile ». Car rien n’est impossible à Dieu. » Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur ; que tout se passe pour moi selon ta parole. » Alors l’Ange la quitta.
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 1, 26-28
QUATRIÈME DIMANCHE DE L’AVENT (B)
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Le Temple de Dieu
S’il est un lieu au monde qui soit l’objet de toutes les contestations et l’enjeu de toutes les violences, c’est bien le « Mont du Temple » à Jérusalem. Sur cet emplacement, qui a vu successivement la construction, puis la destruction de trois temples destinés au culte de la religion juive, et ensuite la construction de deux mosquées, lieux sacrés pour tout l’Islam, c’est bien ce bout de rocher au cœur de la ville de Jérusalem. C’est le roi David qui a commencé, mille ans avant Jésus-Christ. Sa première capitale était Hébron, autre lieu de contestation actuel entre Juifs et Musulmans, mais comme elle n’était ni assez centrale ni assez sûre, David avait conquis la vieille citadelle des Jébuséens, l’une des seules peuplades qui aient survécu à l’invasion et à la conquête des Hébreux deux siècles plus tôt, et il en avait fait sa capitale. Il y avait construit son palais et projetait d’y bâtir un temple. En effet, l’arche d’alliance, un beau coffre de bois contenant les tables de la Loi données par Dieu à Moïse au Sinaï, symbole de la présence de Dieu parmi son peuple, souvenir de l’errance de quarante ans dans le désert, était toujours à la campagne, sous la tente. En voulant installer cette arche d’alliance près de son palais, il avait une visée politique : l’alliance du trône et de l’autel, si vous voulez. Une sécurité pour lui et pour sa dynastie. Dieu avec nous. Un lieu unique de prières et de rites, situé à Jérusalem, était une garantie contre les tentations de dissidence qui travaillaient toujours la plupart des tribus. Double bénéfice donc : pour lui et sa descendance.
Maison = maisonnée
Dieu répond à David par la bouche du prophète Nathan. Il garantit la stabilité de sa dynastie en jouant sur le mot « maison ». Ce n’est pas David qui construira une maison pour Yahvé, c’est Yahvé qui promet à David que sa « maison » - entendez pas là sa « maisonnée », sa famille, au sens où l’on parle (dans nos livres d’histoire par exemple) de « la maison d’Autriche » - que sa descendance sera assurée pour toujours de la protection divine. La confiance de David ne reposera pas sur un édifice, œuvre de ses mains – un Temple fait de mains d’hommes -, mais sur la Parole, la promesse de Dieu.
Et voilà que, des siècles plus tard, la « maison » de David et la « maison » de Dieu vont se rejoindre en un homme, Jésus, qui sera à la fois fils de David et fils de Dieu. Du coup, le Temple, qui faisait l’orgueil des Juifs et était comme un gage de sécurité (« Dieu avec nous ») n’a plus aucune importance, n’est plus nécessaire. C’est une personne vivante qui devient le « temple » de Dieu, le lieu de sa présence. Jésus dira aux Juifs : « Détruisez ce temple, et je le rebâtirai en trois jours », et l’évangéliste prend la peine de bien préciser que Jésus parlait de son propre corps, qui est le lieu authentique de la présence de Dieu parmi les hommes.
Vous êtes le Temple de Dieu
Mais ce n’est pas fini. Saint Paul écrira que « nous sommes le temple du Dieu vivant » (2 Corinthiens 6, 16) Plusieurs fois, on retrouve ce thème dans le Nouveau Testament. L’habitation de Dieu n’est plus un bâtiment de pierre, situé en un lieu bien précis et bien stable : elle redevient mobile, nomade. Elle n’est même plus localisée dans un peuple ou dans une église. C’est le « mystère » dont parle saint Paul : les païens sont admis au même héritage. Le temple de Dieu n’est plus un monument, c’est l’humanité. La terre des hommes est investie par Dieu : à Noël, Dieu entre dans l’humanité, dans toute l’humanité. Ridicule donc, de se battre pour un temple, une mosquée, un mur, une église, une terre. La terre entière est sainte, l’humanité est la « demeure » de Dieu.
Arche d'alliance
L’évangile que nous lisons aujourd’hui illustre, par l’annonce de l’ange à Marie, ce que je viens de dire de façon un peu abstraite. Marie va porter en elle, puis mettre au monde un enfant qui héritera du « trône de David son père » et qui « règnera sur la maison de Jacob ». Mais, surclassant cette hérédité humaine, le « fils de David » sera appelé « fils du Très-Haut ». Fils de David et fils de Dieu. Et c’est dans le corps de Marie que se réalise l’Alliance. Alliance au sens le plus fort. Ce qui arrive à Marie, c’est ce qui arrive à l’humanité.
Dans les Litanies de la Vierge Marie, il y a des expressions qui paraissent souvent incompréhensibles. On s’adresse à Marie pour lui dire qu’elle est « rose mystique, tour de David, tour d’ivoire, maison d’or… » J’en passe. Mais il y a aussi cette invocation que nous pouvons comprendre maintenant : Marie est la nouvelle « arche d’alliance ». C’est par elle que Dieu vient au monde, que l’humanité peut dire que « le Seigneur est avec nous ». Mais par extension, on peut dire que ce n’est pas seulement Marie qui est « le temple de Dieu », mais l’humanité entière, assumée par le Christ. Nous avons dans le récit de l’Annonciation comme le scénario de notre propre aventure spirituelle.
Traverser la peur
Ce récit, en effet, représente un passage de la peur (« Marie fut très troublée » et « l’ange lui dit : n’aie pas peur ») à une foi exemplaire : « Marie répondit : je suis la servante du Seigneur ».Nous avons tous à parcourir le même itinéraire. Traverser la peur pour accéder à la foi, à la confiance prend toute la vie. Le récit se termine par ces mots : « Et l’ange la quitta ». L’ange peut partir : Dieu, grâce au « oui » de Marie, a désormais « planté sa tente » dans l’humanité. Pour nous comme pour Marie, il n’y a plus rien à voir. Il ne nous reste que le souvenir d’une parole autrefois entendue, de l’éblouissement d’une rencontre initiale. Marie va devoir se mettre en route en faisant « fonctionner » la foi du jour de la visite, mais ce sera toute sa vie une foi sans voir. Trente ans d'obscurité et trois ans de marche vers la catastrophe.
Tel est aussi notre lot : au fil des jours, nous devons passer, sans cesse, de la peur à la foi. Dans le silence de Dieu et en dépit d'apparences déconcertantes au jour le jour, « maintenant et à l’heure de notre mort ». La foi de Marie, lent cheminement, atteindra son couronnement au pied de la croix, quand elle devra surmonter définitivement l’angoisse de la crucifixion du Fils qu’elle avait porté dans son sein et mis au monde dans le dénuement de la crèche.
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