Il resta quarante jours, tenté par Satan

Du désert à la Galilée.

 

Jésus venait d'être baptisé. Aussitôt l'Esprit le pousse au désert. Et dans le désert il resta quarante jours, tenté par Satan. Il vivait parmi les bêtes sauvages, et les anges le servaient.

Après l'arrestation de Jean Baptiste, Jésus partit pour la Galilée proclamer la Bonne Nouvelle de Dieu ; il disait : " Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle. "

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc 1, 12-15

PREMIER DIMANCHE DE CAREME (B)

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Le déluge ?

On trouve des récits de déluge dans toutes les traditions populaires de l'antiquité, dans toutes les mythologies. Et même, paraît-il, chez les esquimaux. Je ne sais pas ce qui s'est passé exactement. Sans doute un cataclysme terrible, un raz-de-marée formidable qui a marqué la conscience des peuples et dont l'histoire s'est transmise de génération en génération sous forme de mythes. La Bible reprend la vieille histoire babylonienne, qui date du début du IIe millénaire, mais en lui donnant un tout autre sens.

Pour une alliance.

Le péché de l'homme aurait dû entraîner la destruction de la création tout entière, le retour au chaos originel, au grand abîme de la première page de la Bible. L'homme, en effet, est responsable du cosmos, et le péché crée une hostilité entre l'humanité et la nature. D'où, d'abord, étonnement : comment se fait-il que le monde tienne, qu'il ne sombre pas dans le néant. Au récit du déluge, s'ajoute le récit d'une alliance : l'alliance de Dieu avec toute la création., en la personne de Noé et de sa famille. Cette alliance est fondamentale à plusieurs titres. D'abord, nous apprenons que l'ordre du monde ne sera jamais radicalement détruit par le péché de l'homme. La nature reste bienveillante pour l'homme. Elle lui permet d'exister. L'alliance homme-nature (il n'y aura plus de déluge) exprime l'alliance homme-Dieu. Et elle s'étend à tous les vivants. Non seulement les hommes, mais aussi les animaux et tout le règne végétal. Ce récit mythique nous fait savoir que le mal que font les hommes ne ramène pas au chaos primitif, parce que Dieu pardonne et surmonte le péché, parce que Dieu aime pleinement tout ce qu'il crée. Enfin, cette alliance est une alliance universelle. Nous sommes tous concernés. Dans l'histoire de Noé, Dieu est seul à s'engager et ne demande rien. Le don de Dieu est sans contrepartie. Tout ce que nous pouvons faire, c'est d'y croire. Cela ne signifie pas que nous pouvons faire n'importe quoi. Recevoir le don de Dieu dans la foi nous engage.

Au désert

C'est ce que signifie l'appel de Jésus, tel que Marc nous le relate. Il vient de passer quarante jours en tentation dans le désert. Et aussitôt, il commence sa prédication en criant : "Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle." Le court récit de la tentation, dans l'évangile de Marc, dit tout en quelques mots. Jésus est tenté par Satan. Avant d'être un nom propre, le mot satan est un nom commun : c'est l'adversaire qui barre la route. Jésus s'immobilise. Quarante jours de tentation, rappel des quarante ans qu'Israël passa au désert, où le peuple a "tenté" Dieu. Ils voulaient un Dieu-magicien, et voilà que Dieu se refuse à tout geste magique. Ils voulaient du "tout-cuit", et Dieu leur demande de se prendre en charge. Ils rêvaient d'un Dieu qui, par autorité et puissance, changerait automatiquement les situations, la vie. Et rien n'avance. Rien de perceptible ne se produit. Jésus a connu la même tentation. "Il vivait au milieu des bêtes sauvages et les anges le servaient" : symboles du bien et du mal qui s'affrontent dans la tentation.

Convertissez-vous !

Jésus connaîtra toute sa vie la tentation du sensationnel. Et s'il résiste, c'est parce qu'il est sorti victorieux du combat au désert de la tentation. Il repart et annonce la Bonne Nouvelle. Quelle Nouvelle ? Simplement que Dieu a pris le dessus. Il ne change rien d'un coup de baguette magique. Jésus nous demande simplement de croire à la Bonne Nouvelle, c'est-à-dire d'accueillir le Royaume de Dieu, ce qui exige une conversion. Quelle conversion ? Devenir des hommes libres et responsables, "nous engager envers Dieu avec une conscience droite" (St Pierre). Maîtriser ce qui en nous va vers la mort. C'est le combat de toute notre existence.

Voici le Carême qui commence. Il s'agit, à la lumière de l'appel de Jésus à la conversion, de réviser notre manière de nous relier à Dieu, aux hommes et aux choses. La prière, pour rétablir la communication avec Dieu. Le jeûne, pour prendre un peu de recul par rapport aux choses, aux objets, à tous les biens de consommation. Le partage enfin, pour ouvrir nos esprits et nos cœurs à l'amour efficace de tous nos frères. Emportés par les soucis, nous avons besoin de reprendre pied et de regarder notre vie avec un peu de recul. Où allons-nous ? Que cherchons-nous ? Qu'est-ce qui nous fait courir ? Il ne faut pas rater cette occasion de rajeunir, de renaître de l'eau et de l'Esprit.

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