Alors, on verra le Fils de l’homme venir dans la nuée
PREMIER DIMANCHE DE L'AVENT (C)
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 21, 25... 36
Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées par le fracas de la mer et de la tempête. Les hommes mourront de peur dans la crainte des malheurs arrivant sur le monde, car les puissances des cieux seront ébranlées. Alors, on verra le Fils de l’homme venir dans la nuée, avec grande puissance et grande gloire. Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête, car votre Rédemption approche.
Tenez-vous sur vos gardes, de crainte que votre cœur ne s’alourdisse dans la débauche, l’ivrognerie et les soucis de la vie, et que ce jour-là ne tombe sur vous à l’improviste. Comme un filet, il s’abattra sur tous les hommes de la terre. Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi vous serez jugés dignes d’échapper à tout ce qui doit arriver et de paraître debout devant le Fils de l’homme. »
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Une nouvelle année
Voici qu’avec ce premier dimanche de l’Avent, commence une nouvelle année, du moins au point de vue liturgique. Nouvel an ? La date du premier jour de l’an a constamment changé selon les religions, les régimes politiques, les cultures. Chez les Romains, c’était le 1er mars, au temps de Charlemagne, c’était Noël, et au début du Moyen Age, cette date était variable selon les régions de France. Souvent le 1er avril. La Révolution française l’avait fixée le 22 septembre, avant qu’on n’en revienne à la date presque universelle du 1er janvier. Mais pour l’Église, depuis le commencement, l’année commence avec le premier dimanche de l’Avent. C’est pourquoi, ce matin, j’ai plaisir à vous souhaiter une bonne année.
Cette année qui commence, que sera-t-elle ? Une seule certitude : elle nous rapproche tous du dernier jour de notre existence terrestre, du jour de la Rencontre. En attendant – en préparant – ce Jour, nous connaîtrons certainement des moments de bonheur et des moments de peine. Jésus, ce matin, nous invite à adopter une attitude de lucidité, de courage et d’espérance.
Des recettes de bonheur
J’ai été frappé, ces derniers mois, par le nombre de publications, livres, articles de revues, émissions de télé ou de radio, qui nous offraient des recettes de bonheur. Le Dalaï Lama fait salle comble à Paris, l’un de ses disciples a publié un livre qui a connu un grand succès, des philosophes ont eux aussi écrit sur le bonheur, quantité de gens, célèbres ou non, ont été interrogés sur leur conception du bonheur. Est-ce donc que le bonheur est une chose rare, difficile à acquérir ? Le mot lui-même fait rêver et chacun court après le bonheur. Sans succès, bien souvent. Où trouver le bonheur ? Dans l’argent, dans le pouvoir, dans le plaisir ? Où plus simplement, dans des toutes petites choses, dans ces événements quotidiens que nous sommes invités à accueillir, un sourire, un regard, quelques heures d’intimité avec un être cher, un message. Ou plus simplement encore, dans le geste qu’on a fait pour témoigner de son amour ou de sa compassion.
Et la Bible ?
Comme toutes les religions, comme toutes les philosophies, la Bible adresse au Peuple de Dieu des promesses de bonheur. Aujourd’hui, par exemple, Jérémie annonce que Dieu va accomplir la promesse de bonheur qu’il avait adressée à lsraël et à Juda : une promesse d’un monde où règneraient la justice, la liberté et la sécurité. En quoi réside la réalisation de cette promesse : la naissance d’un descendant de David. Une promesse, c’est pour demain. Oui, mais ! Il faut y croire, et en attendant, Israël connaît les aléas d’un temps de misère : occupation, déportation, guerre et violence. Les promesses, c’est bien joli, mais en attendant ?
Alors, va-t-on se résigner à subir les malheurs de l’époque, « en attendant ». En attendant quoi ? Nous risquons de sombrer dans l’illusion, dans la résignation, ou dans toutes sortes d’évasions. Nous risquons de fuir le réel grâce à toutes les drogues que nous propose le monde actuel. Heureusement, Jésus est là, ce matin, pour nous inviter à faire une lecture réaliste de notre quotidien et à adopter une attitude courageuse dans ce monde qui est le nôtre.
Réalisme
Pour cela, il nous faut d’abord, comme nous le faisons souvent, replacer le texte d’évangile que nous venons de lire dans son contexte. Nous sommes à Jérusalem, à quelques jours de la Passion. Les gens sont là, à admirer le Temple tout neuf, « son ornementation de belles pierres et d’ex-voto », quand Jésus annonce à ses interlocuteurs que « tout sera détruit. » Pour ceux qui l’entendent, pas de doute : la ruine du Temple, la destruction de Jérusalem, ce sera la fin du monde. Dans un long discours d’un style bien particulier – le style apocalyptique – Jésus dévoile, non pas seulement la ruine de Jérusalem ni l’avenir de ce monde, mais la signification du présent. Du présent de son époque, qui est le même que notre présent. Je peux lire ce texte comme sorti de mon quotidien de ce matin : bouleversements cosmiques, trou dans la couche d’ozone ou réchauffement de la planète ; dangers du terrorisme international et généralisation des peurs ; conflits mondiaux ou régionaux, etc.
Debout, éveillés et vigilants
Et, si nous avons regardé avec lucidité ce présent qui est le nôtre, comme Jésus nous y invite, nous pourrons, toujours à son invitation, nous redresser et relever la tête, « car notre délivrance est proche. » Qu’est-ce que cela signifie, concrètement ? Je crois qu’il s’agit d’être trouvés « debout, éveillés et vigilants », comme on le chante dans un cantique. Ne pas nous laisser endormir par les pubs et les messages euphorisants qui nous sont sans cesse déversés, mais aussi ne pas laisser notre cœur s’alourdir « dans la débauche, l’ivrognerie et les soucis de la vie. »
Pour tenir debout, ajoute l’évangile de Luc, il y a un moyen particulièrement efficace : la prière. « Prier en tout temps » : nous verrons tout au long de l’année avec quelle insistance Luc prend soin de nous le recommander. En attendant, Bonne Année.