"Alors on verra le Fils de l'homme venir dans la nuée."
Tenir debout.
Jésus parlait à ses disciples de sa venue : " Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées par le fracas de la mer et de la tempête. Les hommes mourront de peur dans la crainte des malheurs arrivant sur le monde, car les puissances des cieux seront ébranlées. Alors, on verra le Fils de l'homme venir dans la nuée, avec grande puissance et grande gloire. Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête, car votre Rédemption approche.
Tenez-vous sur vos gardes, de crainte que votre cœur ne s'alourdisse dans la débauche, l'ivrognerie et les soucis de la vie, et que ce jour-là ne tombe sur vous à l'improviste. Comme un filet, il s'abattra sur tous les hommes de la terre. Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi vous serez jugés dignes d'échapper à tout ce qui doit arriver et de paraître debout devant le Fils de l'homme. "
Evangile de Jésus Christ selon saint Luc 21, 25...36 PREMIER DIMANCHE DE L'AVENT (C) oOo Pourquoi ?
" Trop c'est trop !" Il y a quinze jours, l'Eglise nous invitait déjà à lire et à méditer un texte " apocalyptique ", rédigé par Marc. Aujourd'hui, c'est Luc qui, en ce premier dimanche de l'Avent, nous rapporte les mêmes propos, dans le même style, prononcés par Jésus, à quelques jours de son arrestation et de sa mort. Une fois, cela passe, mais deux ! Pourquoi donc une telle insistance ?
Eh bien, je crois que l'Eglise, justement, insiste délibérément parce qu'elle a peur de nous voir nous enliser dans le quotidien, un quotidien qui risque de nous laisser sans perspectives d'avenir. C'est comme si elle nous redisait aujourd'hui : dans la conjoncture actuelle, faites attention de ne pas avoir " la vue basse ". Il faut relever la tête, regarder " plus loin que le bout de votre nez ". " Soyez des hommes de demain ", des veilleurs dans la nuit, et vous aurez certainement une autre perception, une perception plus juste de ce que vous vivez aujourd'hui.
Aspiciens a longe...
Autrefois, quand les prêtres disaient leur bréviaire en latin, ils commençaient l'année liturgique, la veille du premier dimanche de l'Avent, par une antienne dont les premiers mots étaient " Aspiciens a longe… ". Ce qui signifie : " Regardant au loin, je vois venir la puissance de Dieu ". Une autre image me vient à l'esprit en lisant ce passage d'Evangile, c'est celle de la sentinelle, de l'homme qui veille dans la nuit alors que tout dort. De lui, et de lui seul, dépend le sort de ceux dont il a la responsabilité. Il est là pour protéger, mais aussi pour alerter.
Eh bien, à partir de ces deux images, celle de l'homme qui regarde au loin et celle de la sentinelle, je vais pouvoir lire une parole que Jésus m'adresse, à moi aujourd'hui. Une parole qui peut donner sens à ma vie personnelle ; et une parole qui éclaire le destin de notre humanité.
Notre lot quotidien.
Il y a la situation présente. Ce n'est pas reluisant ! Le millénaire qui vient de s'achever - et particulièrement le dernier siècle - a connu guerres, famines, souffrances, crises, génocides, infiniment plus massifs qu'à aucune autre époque de l'histoire. Le Christ moqué, les chrétiens ridiculisés, tournés en dérision, persécutés, l'apostasie d'un grand nombre, l'indifférence généralisée, c'est notre lot quotidien. Dieu est-il mort ? Le doute souvent nous envahit ! Tout cela, le Christ le décrit dans son message apocalyptique. Relisez Luc 21, et Marc 13, et Matthieu 24 !
Les soubresauts de l'histoire.
En quoi consiste ce message ? Le mot Apocalypse signifie " lever un coin du voile ", dévoiler. Jésus ne nous parle pas, comme un pourrait le croire, de la fin du monde. Rien à voir avec ce qu'on appelle aujourd'hui " l'apocalypse nucléaire ". La fin du monde, vous pouvez en convenir, cela ne nous concerne pas directement : on se dit que ce n'est pas pour nous ; c'est dans un futur hypothétique, dans combien de millénaires ? De toutes façons, on ne sait pas quand cela se produira. Ce serait totalement démobilisateur de nous renvoyer ainsi dans un futur extrêmement lointain. Non, Jésus ne nous parle pas de la fin du monde. Il nous parle de la fin d'un monde ancien ET de la naissance d'un monde nouveau. Ce passage se fait dans les soubresauts de l'histoire, là, sous nos yeux. Nous y sommes. Et nous y sommes impliqués. Il s'agit de la lutte entre Dieu et le chaos, entre lumière et ténèbres, entre vie et mort. Saint Paul écrit : " La création tout entière gémit dans les douleurs de l'enfantement ".
Voilà la " crise " évoquée par les textes apocalyptiques. Le dictionnaire décrit la crise comme une " phase grave dans l'évolution des choses, des événements ". La crise évoquée par Jésus est infiniment plus importante, plus large et plus profonde que les crises que nous vivons actuellement, crise économique, crise de société, par exemple. Mais ces moments de notre histoire contemporaine sont significatifs. Toute crise est certes douloureuse, contribue à faire de nombreuses victimes, mais en même temps elle oblige les hommes et les sociétés à se renouveler et à marcher vers de nouveau progrès. Les guerres de ce siècle, par exemple, en même temps qu'elles ont tué des millions d'êtres humains, ont fait évoluer les techniques d'une façon très rapide.
Tenir debout.
Dans les soubresauts de l'histoire que nous vivons aujourd'hui, Jésus s'adresse à nous pour nous mettre en garde et nous donner les moyens de tenir debout. Il nous invite d'abord à ne pas regretter " le bon vieux temps ", à ne pas nous réfugier dans une attitude nostalgique et inféconde. Il nous invite donc à " nous redresser et relever la tête ". C'est-à-dire à apprendre à lire, dans les événements de notre quotidien, les signes de l'avènement de ce monde nouveau qui se construit chaque jour. Bien plus, il nous demande d'être des veilleurs. Donc d'être éveillés. C'est-à-dire ne de pas nous laisser endormir par les soucis de ce monde. Et il y en a, de ces soucis qui nous envahissent : la pub', la dictature de l'argent, la soif de la possession, la volonté de puissance, et toutes les évasions du réel. Oui, nous sommes tentés en permanence.
Luc, et lui seul, a retenu un conseil donné par Jésus, pour nous permettre de résister à ces tentations : prier. Si nous persévérons dans la prière, nous ne nous laisserons pas abattre. Nous pourrons tenir debout et voir plus loin que les péripéties de l'instant présent. Ainsi, nous pourrons continuer notre route terrestre avec assurance et pleine confiance, jusqu'au jour où " nous paraîtrons devant le Fils de l'homme ".