Le Père me glorifiera

Mystère d'Amour

 

Avant de passer de ce monde à son Père, Jésus disait à ses disciples : " J'aurais encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l'instant vous n'avez pas la force de les porter. Quand il viendra, lui, l'Esprit de vérité, il vous guidera vers la vérité tout entière. En effet, ce qu'il dira ne viendra pas de lui-même : il redira tout ce qu'il a entendu, et ce qui va venir, il vous l'expliquera. Il me glorifiera, car il reprendra ce qui vient de moi pour vous l'expliquer. Tout ce qui appartient au Père est à moi ; voilà pourquoi je vous ai dit : il reprend ce qui vient de moi pour vous l'expliquer. "

Evangile de Jésus Christ selon saint Jean 16, 12-15

LA SAINTE TRINITE (C)

oOo

Le catéchisme.

J'ai retrouvé le vieux catéchisme de mon enfance. Je cite :

· Qu'est-ce que le mystère de la sainte Trinité ?

Le mystère de la sainte Trinité est le mystère d'un seul Dieu en trois personnes distinctes et égales : le Père, le Fils et le Saint-Esprit.

· Il y a donc trois Dieux ?

Non, ces trois personnes, quoique distinctes, ne sont pourtant qu'un seul et même Dieu. Les trois personnes de la Sainte Trinité sont distinctes, parce que le Père n'est pas le Fils, le Fils n'est pas le Père, le Saint-Esprit n'est ni le Père ni le Fils.

Scepticisme.

Voilà ce que j'ai appris lorsque j'étais petit. Comme je comprends l'ironie des sceptiques (" Le mystère de la Trinité ? Mais il n'y a pas de mystère. Juste des mathématiques : Dieu et Dieu font trois. ", écrit Romano Celli). D'où l'incompréhension des Juifs et des Musulmans qui nous accusent d'être polythéistes et d'adorer trois dieux. D'où également ma perplexité d'enfant devant de telles affirmations théologiques.

On raconte que saint Augustin, méditant un jour sur le mystère de Dieu en se promenant sur la plage, rencontra un enfant qui avait creusé un petit trou dans le sable, allait puiser de l'eau dans la mer, la versait dans le trou, puis recommençait sans cesse le même geste. Augustin s'arrêta pour lui dire : " Tu vois bien que le sable absorbe tout de suite l'eau que tu verses. Tu n'arriveras jamais à remplir le trou ! " Et l'enfant (c'était un ange) de lui répondre : " J'aurai fini avant que tu n'aies trouvé la clé du mystère de la sainte Trinité ! "

Qui est Dieu ?

Alors, il ne faut pas chercher à comprendre ? Mais de tout temps les hommes ont cherché à savoir qui était Dieu. C'est une des recherches les plus anciennes et les plus générales de l'humanité. A travers ce qu'ils voyaient de la nature et du cosmos, les hommes ont pu dire, maladroitement d'ailleurs, un Dieu (ou des dieux) à l'origine de tout ce qui existe. Puis, à ce Dieu, à ces dieux, ils ont prêté figure humaine, et bien plus, des traits de caractères humains : des dieux à l'image des hommes, avec leurs qualités, leurs défauts et même leurs vices. A partir de là, ils ont inventé des types de relations avec la divinité, pour se la concilier, pour en être bien considérés, pour ne pas en être punis.

Une révélation...

Il faudra en arriver à la révélation biblique, et donc, au judaïsme, pour inverser le processus. Dieu se fait connaître des hommes. Il se révèle à eux, et ils découvrent que ce sont les hommes qui sont créés à l'image de Dieu, et non l'inverse. Toute la Bible nous présente un Dieu personnel, unique, qui intervient dans l'histoire des hommes. La révélation est inaugurée (pour faire simple) avec l'intervention de Dieu en faveur d'un petit peuple menacé de génocide en Egypte. Un Dieu libérateur. Il y a dû avoir un événement très fort, à ce moment-là de l'histoire, au XIIIe siècle avant notre ère, pour que les hommes en aient perpétué le mémorial de génération en génération, jusqu'à nos jours. Puis cette révélation s'est développée au cours des âges, à travers toute une histoire dont le point culminant est marqué par la naissance, la vie, la mort et la résurrection de Jésus. Au jour de son baptême par Jean, au bord du Jourdain, Dieu le présente comme son Fils bien-aimé, et l'Esprit, sous l'apparence d'une colombe, vient reposer sur lui. Ainsi se réalise l'annonce d'Isaïe qui avait écrit, cinq siècles plus tôt : " L'Esprit du Seigneur est sur moi : il m'a envoyé annoncer une bonne nouvelle aux pauvres, proclamer la libération des captifs, annoncer une année de bienfaits. "

...dans un développement...

La révélation biblique du Dieu d'amour se fait ainsi, progressivement, dans un développement continu. Ce Jésus que Dieu appelle son Fils, qui déclarera un jour à son ami Philippe : " Qui me voit, voit le Père ", promet à ses disciples, à la veille de sa mort, de ne jamais les quitter, de leur transmettre son propre Esprit. Désormais sa présence ne sera plus celle de quelqu'un face à face, de quelqu'un avec ses amis, mais une présence intérieure. " Si quelqu'un m'aime, mon Père l'aimera, nous viendrons en lui, nous ferons de lui notre demeure. " Les apôtres seront chargés par Jésus d'annoncer au monde entier cette Bonne Nouvelle d'un Dieu qui aime les hommes, et dont l'Esprit remplit l'univers de cette présence amoureuse. Si bien que l'apôtre Paul pourra dire aux jeunes chrétiens convertis à la foi nouvelle : " Votre corps est le temple du Saint Esprit ".

...jusqu'à nos jours.

Si la révélation du Dieu-Amour culmine en Jésus-Christ, elle ne s'arrête pas là. Il va y avoir tout un développement de la réflexion dans les Eglises chrétiennes, notamment dans les premiers siècles de notre ère. Ecrits des Pères, déclarations des conciles permettront d'élaborer une théologie de ce qu'on appelle le " Mystère de la Sainte Trinité. " Là, il faut bien reconnaître que ces définitions, toutes plus intellectuelles les unes que les autres, et même si elles sont nécessaires pour déterminer le contenu de notre foi et éviter les risques de déviations doctrinales, nous laissent assez déroutés, et ne sont pas tellement faites pour nourrir nos démarches de croyants. Et pourtant, il s'agit là de l'affirmation centrale de notre foi, celle dont dépend tout le reste. Nous apprenons que Dieu n'est pas ce despote monolithique que nous imaginions, mais qu'il est relation et n'existe que par ces relations. Ce qui nous fait être est échange, échange de soi. Dieu n'est qu'en échangeant son être. Il est en lui-même mouvement, don reçu et redonné. C'est pourquoi nous pouvons le dire Amour.

Enfants de l'amour.

Disant cela, j'ai bien conscience de balbutier. Mais je sais aussi que nous ne pouvons nous construire, exister, nous " sauver " qu'en étant l'image de ce Dieu-là. Cela signifie que nous ne pouvons être nous-mêmes tout seuls. Nous nous créons, nous nous bâtissons dans la mesure où nous nous relions, où nous communiquons ce que nous sommes. Nés d'une parole d'amour, nous sommes parole, échange. Nés de la relation de deux personnes différentes, nous ne sommes que par les apports des autres, et nous ne vivons qu'en passant à d'autres ce que nous sommes. Si nous ne sommes pas amour, nous ne sommes pas. " Sans amour on n'est rien du tout " Sachons accueillir et faire fructifier, en nous et dans notre monde, le don de Dieu.

    

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