J’ai toujours
été frappé de voir combien les textes bibliques, aussi bien dans l’Ancien
que dans le Nouveau Testament, annoncent la venue du Messie en termes
lyriques, pour donner une dimension cosmique à l’événement. Ce n’est pas
seulement un petit peuple, Israël, ni même l’humanité entière qui sont
concernés, mais toute la création, le cosmos. « Le ciel et la terre ».
« Cieux, répandez votre rosée », car « la terre entière a vu le Sauveur
que Dieu nous donne. » Et les hymnes nous font demander : « Vienne le
juste comme rosée, la terre s’ouvre à notre Sauveur », cette « terre
brûlante comme un désert », cette « terre en genèse », elle « attend son
printemps pour le grain ». Bref, « l’univers périt sans toi, toi qui viens
pour tout sauver. » Les contes de Noël ont ceci de bon, c’est qu’ils
disent, d’une certaine manière, une réalité indicible autrement : on y
voit toute la nature qui s’illumine, des phénomènes cosmiques incroyables,
et même, selon la légende, tous les animaux qui peuvent parler, la nuit de
Noël.
Au commencement
Sans vouloir
faire une étude des « particules élémentaires », disons que l’événement
que nous célébrons aujourd’hui a une portée universelle. L’enfant que les
bergers sont allés voir dans une auge, c’est le Créateur de l’univers.
Rendez-vous compte de l’énormité de cette affirmation. Le Verbe de Dieu,
il est « au commencement ». Non pas au début du monde, à l’instant
du big bang, mais « au commencement » absolu, en dehors du début du
temps du monde. A cette première affirmation du Prologue succède un
deuxième énoncé : « Tout fut par lui, et rien de ce qui fut, ne fut
sans lui. » Avouons qu’il est paradoxal de faire une telle
affirmation : rien ne pouvait le faire voir, ni dans l’enfant de la
crèche, ni dans le charpentier de Nazareth, ni surtout dans le supplicié
du Vendredi Saint. Et pourtant, c’est ce que Jean a découvert, ce qu’il
affirme à plusieurs reprises après la résurrection. Relisez le début de sa
première lettre : « Ce qui était depuis le commencement, ce que nous
avons entendu, ce que nous avons contemplé de nos yeux, ce que nous avons
vu et que nos mains ont touché, c’est le Verbe de vie. » Dieu
lui-même, si proche, que l’on peut toucher ! On comprend que Jean ait tenu
à nous communiquer cette bonne nouvelle, si incroyable fût-elle.
Qu’est-il venu
faire sur cette terre ? Nous parler. Mais pas seulement avec sa bouche,
pas seulement avec des mots et des phrases. L’enfant de Bethléem ne
pouvait pas parler, et pourtant son message est éloquent. Comme le message
de tout bébé, qui dit à la fois une dépendance – il dépend essentiellement
des adultes qui l’entourent, à commencer par ses parents – et un avenir.
Il est notre avenir. Et ce ne sont pas seulement les paroles qu’il a
prononcées durant sa vie terrestre et que les évangélistes ont recueillies
qui sont importantes : sa vie tout entière est un message, de même que sa
mort et sa résurrection. Donc, Dieu se présente à nous comme celui qui
nous parle.
Communication
L’auteur de la
Lettre aux Hébreux ne nous dit pas autre chose. Relisez tranquillement ce
texte : « Après avoir, à bien des reprises et de bien des manières,
parlé autrefois aux pères dans les prophètes, Dieu, en ces temps qui sont
les derniers, nous a parlé par son Fils, par qui il a créé les mondes. »
Il faut croire qu’il avait quelque chose d’extrêmement important à nous
dire, pour s’être dérangé lui-même ! Il faut croire que les messages des
nombreux prophètes qui avaient été ses porte-parole au cours des siècles
ne suffisaient pas. Quelle est donc cette chose si importante qu’il avait
à nous dire ? Personnellement, je crois que c’est ce que Jésus a dit une
nuit à Nicodème : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils,
son unique, pour que tout homme qui croit en lui ne périsse pas, mais ait
la vie éternelle. »
Je ne sais plus
qui déclarait un jour que Dieu était tellement amoureux de l’homme qu’il
avait voulu expérimenter ce que c’était vraiment que d’être homme. C’est
vrai, mais ce n’est pas suffisant. Il ne s’agit pas, de la part de Dieu,
d’une simple curiosité ou d’une expérience à faire. C’est infiniment plus.
Quand on aime, on veut ne plus faire qu’un avec l’être aimé. Seulement, il
y a toujours la barrière des corps. Une séparation irrémédiable. En Dieu,
je crois que l’amour qu’il éprouve pour sa créature le fait éliminer cette
barrière, cette séparation qu’on croyait infranchissable. Il faut croire
que cet amour est tout-puissant, pour vaincre ainsi tout obstacle. Le
croyons-nous ? Quiconque croit cela ne peut pas périr. Il a la vie
éternelle. Il est déjà entré dans ce monde de l’amour universel et il en
vit. Je suis aimé de Dieu. Nous sommes enfants de l’Amour.
Voilà quel est le retentissement cosmique de
l'événement qui a eu lieu, certes, un jour du temps (il y a vingt
siècles), mais qui, aujourd'hui comme au premier jour, nous fait vivre.
"A tous ceux qui l'ont reçu, à ceux qui croient en lui, il a donné le
pouvoir de devenir enfants de Dieu... Ils sont nés de Dieu."
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