L'INTELLIGENCE DES ECRITURES
Nouvelle série : Saint Paul en son temps
Qui était saint Paul ? Que lui apporta sa formation juive et grecque ? Comment écrivait-on à l'époque ? Qui vivait alors à Corinthe, Antioche, Ephèse ? Et comment y vivait-on ? Comment circulait-on ? Quelles étaient les grandes philosophies ? Quelle était la condition de la femme ? Autant de questions qui vont nous permettre, en 6 séquences (chaque quinzaine) de situer Paul en son temps.
Nous n'avons comme sources uniques que deux textes : Philippiens 3, 4-6 et Actes 22, 3-5. Ces textes nous apprennent que Paul est né à Tarse, en Asie Mineure, et qu'il a reçu une formation rabbinique à Jérusalem. Il est sans doute né en 5 après J.C. (au moment de la mort d'Etienne - Actes 7, 58 - il est encore "jeune"). Combien de temps a-t-il vécu à Tarse ? Sans doute au moins jusqu'à l'adolescence. En effet, il a une bonne connaissance du grec. Cependant (Actes 22, 3), il nous dit qu'il a "grandi" à Jérusalem, dans la maison de ses parents. Un neveu de Paul, fils de sa soeur, est à Jérusalem en 58 (Actes 23, 36), ce qui va dans le sens de cette hypothèse. Mais alors, pourquoi, s'il n'a pas grandi à Tarse, y retourne-t-il si fréquemment avant ses missions ?
Chapitre 1 - Un Juif de Tarse.
A - Etat-Civil.
"Circoncis le huitième jour, de la race d'Israël, de la tribu de Benjamin, Hébreu, fils d'Hébreux. Pour la loi, pharisien" (Philippiens 3, 5)
"Je suis juif, de Tarse en Cilicie, citoyen d'une ville qui n'est pas sans renom." (Actes 21, 39)
Paul est né au sein d'une famille de pure race juive, fière de ses origines, attachée à sa foi. Le père était sans doute tisserand, fabricant de tentes, comme Paul le sera plus tard. Une famille de condition aisée, puisque Paul à reçu la citoyenneté romaine (Actes 22, 25-28). Plus d'une fois, Paul invoquera ce titre quand il aura maille à partir avec l'autorité romaine (Actes 16, 37, par exemple). Il a apprécié les bienfaits de la "Pax Romana", instaurée après un siècle de guerres civiles, en 31 après J.C., grâce à la victoire d'Octave sur Antoine et Cléopâtre à Actium (2 septembre). Il donnera des consignes de loyalisme politique à une époque où l'Église n'a pas encore souffert de l'Empire romain. Plus tard, Jean, par exemple, dans l'Apocalypse, y verra "la Bête", lors de la persécution de Domitien. Paul, par contre, est très sévère pour la "haute société" qui étale ses vices en plein jour (Romains 1, 18-32)
B - Le double nom : Saül - Paulos
Dans ses lettres, il se présente toujours sous le nom de Paulos, même quand il fait état de ses lettres de noblesse juives. Seul, Luc nous a conservé dans les Actes le nom juif de Saül. Il ne parle de Paulos qu'à partir de Actes 13, 9 (rencontre avec Sergius Paulus à Chypre.) Cela ne veut pas dire que c'est à ce moment-là que Paul changea de nom. Le double nom était fréquent dans un milieu cosmopolite comme celui du bassin méditerranéen. Voir, par exemple, Johannan, "Jean, surnommé Marc", le futur évangéliste, en Actes 12, 12. Silas est également appelé Sylvain. Pour des Grecs, Saoulos était un nom qui sonnait mal : il évoquait un homme à l'allure efféminée. C'est pourquoi Saül se fait appeler Paul.
C - La ville de Tarse.
C'est aujourd'hui une ville moderne, sans caractère. Peu de vestiges de la période romaine. Elle fut jadis très prospère à cause de sa position géographique : non loin de la mer, avec un port sur le fleuve Cydnus. En relation avec Antioche par les "Portes syriennes", défilé à travers le Taurus, et avec le haut plateau d'Anatolie par les "Portes ciliciennes". La ville était renommée pour la fabrication du "cilice", rude étoffe en poils de chèvres qui servait à fabriquer les tentes de nomades. A l'atelier paternel, Paul a appris ce métier qu'il exercera par la suite avec fierté (Actes 18, 2-3 - 20, 34 - 1 Corinthiens 9, 13-15)
A l'époque, Tarse était une ville de 300 000 habitants, à la population très mélangée. C'était une ville universitaire. Le géographe Strabon écrit que "les habitants sont tellement passionnés pour la philosophie, leur esprit est si encyclopédique que leur cité a fini par éclipser Athènes, Alexandrie... Tarse possède des écoles pour toutes les branches des arts libéraux". Parmi les gloire de Tarse, on nomme le poète Arastros (3e siècle avant J.C.) que Paul cite dans son discours à l'Aréopage. Il y a également Athénodore, qui fut précepteur d'Auguste. C'est lui qui disait à son élève : "Lorsque tu es en colère, César, ne dis rien, ne fais rien, jusqu'à ce que tu aies répété toutes les lettres de l'alphabet"
Paul a-t-il fréquenté les cours d'un philosophe à Tarse ? Dans ses lettres, il utilisera fréquemment un procédé de discussion, la "diatribè", procédé où un interlocuteur, souvent fictif, est pris à partie. Socrate usait souvent de ce procédé. En tout cas, Paul est redevable à l'esprit grec de son sens de la liberté et de la responsabilité, de la constante recherche des causes, de l'allégorie du corps et des membres, de la valeur donnée à l'intelligence, entre autres. Sa culture n'est pas livresque, mais elle est celle d'un homme de son temps, ouvert aux discussions de la place publique.
Du point de vue religieux, Tarse est comme toutes les villes du bassin méditerranéen. il y a les dieux de la cité, dieux très anciens, Baal, Tarz et Sandon, dieu de la végétation dont on célébrait chaque année la mort et le retour à la vie. Et puis, il y a tous les dieux du Panthéon grec et, plus récemment, le culte de Rome et d'Auguste.
D - Un Juif de la Diaspora.
La "Diaspora (mot grec qui signifie "dispersion") était très florissante à l'époque. On estime qu'en Palestine, il y avait alors 2 millions et demi d'habitants, dont 2 millions de Juifs. mais dans l'empire, il y avait 4 millions de Juifs, soit 7% de la population. Ajoutez à cela 1 million de Juifs hors de l'Empire (l'Irak actuel notamment). Lisez dans Actes 2, 9-11, au récit de la Pentecôte, l'énumération des nations et vous aurez une idée de la dispersion des Juifs.
Donc on a affaire à une expansion démographique considérable. Pourquoi ? D'abord parce que les Juifs ont le sens de la famille. A la différence des Romains et des Grecs, ils n'admettent ni l'avortement, ni "l'exposition" (l'abandon) des nouveaux-nés. Ensuite, on constate de leur part un intense mouvement de prosélytisme. Depuis le 3e siècle avant J.C. ils ont le souci de "transmettre au monde la lumière incorruptible de la Loi". Ce sont souvent des commerçants, à leur sens des affaires ils joignent un intense zèle religieux. Enfin, depuis Jules César, les Juifs jouissent d'une large autonomie interne. Leur religion est reconnue, et donc ils sont dispensés des cultes de la cité et du culte de Rome. Ils ne sont pas astreints au service militaire. Ils envoient à Jérusalem l'impôt pour le Temple. La communauté a ses propres tribunaux (en 1 Corinthiens 6, 1-11, Paul fait de vives remontrances à des chrétiens qui vont devant les juges païens).
Et naturellement, à cause de cette situation, naît un véritable antisémitisme, bien avant l'ère chrétienne. Ils suscitent envie et rivalités. Le gouverneur Flaccus ayant confisqué l'or collecté par les Juifs romains pour le Temple de Jérusalem, il est traîné en justice. C'est Cicéron qui le défend et déclare : "S'opposer à cette superstition barbare a été le fait d'une juste sévérité." Malgré cela, les conditions générales sont celles d'une large prospérité pour les Juifs de l'Empire. Les pogroms sont exceptionnels. L'un des derniers a lieu en 38 à Alexandrie. Mais malgré ces conditions favorables que leur fait le pouvoir romain, l'agitation est constante en Palestine. Alors que, grâce à la Pax Romana, la situation générale dans le reste de l'Empire est calme, en Palestine, les Juifs font de la résistance.
E - La Septante.
C'est la traduction grecque de la Bible. Très vite s'est révélée la nécessité, pour les Juifs de la Diaspora, d'avoir une traduction de la Bible hébraïque. Les Juifs dispersés ne comprennent pas l'hébreu, ils ne parlent que le grec. Cette traduction s'est faite à Alexandrie aux 3e et 2e siècles avant Jésus-Christ. On l'appelle la Septante parce que la légende veut que soixante-dix anciens se soient réunis pour faire cette traduction en un temps record. Cette traduction diffère souvent du texte original en hébreu. On y trouve des adaptations au goût du jour et des enrichissements doctrinaux. Un seul exemple : le Psaume 16, 8-11 : un malade demande à Dieu de "ne pas tomber dans la fosse". Le livre des Actes, citant ce psaume, écrit : "tu ne laisseras pas ton Saint voir la corruption".
La Septante est plus complète que la Bible hébraïque. On y trouve en plus, par exemple, le livre de la Sagesse dont saint Paul s'inspirera à plusieurs reprises.
F - La vie de prière à la synagogue
La synagogue est le centre vital de la vie religieuse et sociale des juifs de la Diaspora. Toute sa vie, Paul cherchera à en fréquenter les offices. Voici les prières que Paul a appris dès son jeune âge, et qu'il dira toute sa vie :
* Shema Israël (Deutéronome 6, 4-9) : "Ecoute Israël, l'Eternel notre Dieu, l'Éternel est Un. Béni soit à jamais le nom de son règne glorieux. Tu aimeras l'Éternel ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir." Devenu chrétien, Paul maintiendra avec force cette proclamation de l'Unité divine (1 Corinthiens 8, 5-6)
* Shemoné Ezré (Les 18 bénédictions) : "Béni sois-tu, Adonaï, Dieu d'Abraham et Dieu d'Isaac et Dieu de Jacob, Dieu très-haut, auteur du ciel et de la terre, notre bouclier et le bouclier de nos pères, notre confiance en toute génération et génération. Béni sois-tu, Adonaï, le bouclier d'Abraham."
Chapitre 2 - Pharisien à Jérusalem
Philippiens 3, 5-6 : "Pour la loi, pharisien. Pour le zèle, persécuteur de l'Église. Pour la justice qu'on trouve dans la loi, devenu irréprochable."
Actes 22, 3 : "C'est ici dans cette ville que j'ai été élevé et que j'ai reçu aux pieds de Gamaliel une formation stricte à la loi de nos pères. J'étais un partisan farouche de Dieu, comme vous l'êtes aujourd'hui."
A - Le pharisaïsme.
Le mouvement remonte au 2e siècle avec notre ère. C'est un mouvement laïc qui vise à former une communauté de purs à l'intérieur d'Israël. Le mot "parush" signifie "séparé", saint. C'est en 70 après J.C qu'il s'imposera comme seul représentant du judaïsme orthodoxe. Au temps de Paul, il compte un nombre limité de membres, environ 6 000, groupés en confréries, mais il exerce déjà, par ses docteurs, une grande influence sur la population. Il considère que tout le peuple est appelé à la sainteté, et donc, il exige pour tous les lois de pureté qui, à l'origine, n'étaient édictées que pour les prêtres quand ils exerçaient leurs fonctions dans le sanctuaire. Ils exigent une observance rigoureuse de la loi du sabbat. Les sadducéens s'en tiennent à la loi écrite, alors que les pharisiens donnent la plus grande importance aux "traditions des pères."
Quand on parle des pharisiens, il faut se garder de deux dangers :
* faire du mouvement un parti "anticlérical". Même s'ils limitent le rôle des prêtres au culte, ils sont très attachés au Temple et à ses sacrifices.
* juger leurs intentions selon la polémique chrétienne. Ils n'étaient pas des "hypocrites" comme on le lit trop souvent dans les évangiles. Dans l'ensemble, ils avaient un grand "zèle pour Dieu". Paul le reconnaîtra (Romains 10, 2)
B - Les écoles de scribes
Les scribes (ou docteurs de la Loi) jouissent d'un grand prestige. Les sadducéens ont leurs scribes, mais la plus grande partie des scribes sont pharisiens. Jérusalem n'en a pas le monopole. La communauté de Babylone a ses propres docteurs. Mais Jérusalem jouit d'un prestige unique. Hillel, jeune, vient de Babylone. De même Paul viendra de Tarse.
Leur enseignement est entièrement centré sur la connaissance de la Loi, c'est-à-dire : 1 - la Torah (les 5 premiers livres de la Bible, qu'on appelle la "Loi de Moïse"). 2 - Les Traditions des Pères (qui est la Loi orale). 3 - Les textes prophétiques (très importants pour les pharisiens, sans importance pour les sadducéens). 4 - Les Ecrits (notamment les Psaumes).
Le premier travail est consacré à la compréhension du texte (la connaissance de la "Lettre"). Puis vient l'interprétation (midrash), juridique ou édifiante. Là les différentes écoles divergent : c'est le lieu de la controverse.
La mémoire joue un rôle essentiel. Chaque école a ses répétiteurs qui peuvent réciter imperturbablement tout ce que le maître veut faire entendre à ses élèves. Le bon étudiant est "comme une éponge qui s'imbibe de la doctrine du maître", ou "comme une citerne bien crépie qui ne laisse perdre aucune goutte d'eau." Chacun a ses propres techniques de mémorisation : on appelle cela "enfiler des perles". Les textes s'accrochent les uns aux autres par des mots-crochets. On trouve cela aussi dans les évangiles. Et également chez Paul. En Romains 3, 10-18, Paul "enfile" cinq textes différents de la Bible.
Les étudiants forment une communauté étroite avec leur maître, qui les forme autant par son comportement pratique que par son enseignement. Les diplômes : à la fin on devient "docteur", et on peut siéger dans les tribunaux pour les causes mineures ; puis, après 40 ans, on peut devenir docteur "ordonné" (par une imposition des mains) et siéger au tribunal pour les affaires criminelles.
Chez les pharisiens, on discerne plusieurs tendances. Au temps d'Hérode, on a deux grands maîtres : le rabbin Hillel, libéral, et favorable aux prosélytes, et le rabbin Shammaï, rigoriste et défiant envers les prosélytes. Le maître de Saül, Gamaliel, se rattache au courant libéral de Hillel. Quant à Saül ?
C - Saül, le persécuteur.
Première remarque : dans cette première persécution, seul les Hellénistes sont visés. Les chrétiens qui, avec les Douze, continuent à fréquenter le Temple, échappent à la répression.
Les Hellénistes ont des positions plus radicales (Actes 6, 13 et suivants). Etienne condamne le culte du Temple et présente Jésus comme le vrai prophète. On le condamne selon la loi du Deutéronome (13, 2-6) pour avoir tenté de détourner le peuple de la Loi de Moïse.
Saül, nous dit le livre des Actes, est "rempli de zèle". C'est un mot hébreu qui signifie un attachement passionné. La Bible présente Yahweh comme un Dieu jaloux, exclusif, exigeant un attachement sans partage, voire fanatique. Elie, après avoir massacré les 450 prêtres de Baal, s'écrie : "Je suis rempli d'un zèle jaloux pour Dieu". De même Matathias (1 Maccabées 2, 24)
Au début de l'ère chrétienne, le mouvement zélotes s'inspire des mêmes principes : soumission totale à la Loi et libération, purification de la Terre sainte de tout ce qui la souille. Donc, il faut exterminer les rebelles, les infidèles. Il n'est pas certain que Saül ait été lui-même zélote, mais on sait qu'une grande partie des pharisiens avait une grande sympathie pour eux.
Pourquoi Saül va-t-il persécuter les partisans de Jésus ? D'abord parce qu'ils déclarent Messie un homme qui a été condamné par les plus hautes autorités spirituelles de son peuple. Ensuite, avec la critique du Temple par Etienne, c'est tout le système de la Loi (de la religion juive) qui se trouve menacé, et par là-même l'existence d'Israël en tant que peuple. Le christianisme apparaît à Paul comme l'apostasie par rapport à la religion juive.
II - La vocation de Paul
Il est difficile de dater la conversion de Paul. On a fait différents calculs selon les rares renseignements donnés par Paul (Galates 1, 18 et 2, 1). On en arrive à la date probable de 33, ou 34, donc très tôt après la mort et la résurrection de Jésus.
1 - Le témoignage de Paul.
En arrivant pour la première fois dans une synagogue ou un lieu public, Paul, chaque fois, se présente. Chaque fois, il se dit "Apostolos". Le mot se rattache au verbe grec "apostollein", envoyer. C'est un mot nouveau. Le verbe est employé souvent dans la Septante, mais pas le nom. Comme les prophètes d'autrefois, comme les Douze en Galilée, Paul a fait l'objet d'un choix gratuit et bénéficié d'un appel en vue d'une mission toujours plus vaste.
Quand il écrivait à des communautés qu'il avait fondées, Paul n'avait pas à redire les circonstances de son appel. Mais dans certains cas, il est obligé de redire l'originalité de sa mission :
° 1 Corinthiens 9, 1 : Il a vu le Seigneur.
° 1 Corinthiens 15, 1-11 : "...enfin il m'est apparu à moi, l'avorton" (Paul se met sur la liste des témoins officiels.)
° Galates 1, 11-17 : "Lorsqu'il a plu à Celui qui m'a mis à part dès le ventre de ma mère de révéler son Fils en moi pour que je l'annonce parmi les nations..."
° Philippiens 3, 4-16. En se saisissant de Paul sur le chemin de Damas, le Christ lui a appris à sacrifier les anciennes valeurs pour trouver son salut dans la foi.
De tous ces textes se dégagent un certain nombre de points communs :
- Paul ne décrit jamais la vision qu'il a eue. il est certain d'avoir rencontré le Seigneur, mais les mots humains ne peuvent exprimer ce que fut cette révélation.
- L'initiative vient du Père. Paul se situe dans la ligne des prophètes. Il reprend des expressions relatives à Jérémie ou au Serviteur de Dieu dans Isaïe.
- Le Christ s'est donné lui-même à voir. Rappelez-vous cette forme verbale qui indique bien l'intervention divine. Paul dira qu'il a été "saisi" par le Christ Jésus. Et cette intervention a transformé Paul. Il est constitué Apôtre, au même titre que les Douze.
- Il est envoyé spécialement aux "nations". Sans doute Paul n'a-t-il pris conscience de cet objectif que progressivement.
- Devant son passé de persécuteur, Paul n'a pas de fausse honte. Il a agi de bonne foi (Philippiens 3, 4-6)
2 - La présentation de Luc.
Luc a trois récits de la conversion de Paul. L'un à sa place normale (Actes 9, 1-19), les deux autres sous forme de discours de Paul : devant les Juifs (Actes 22, 4-21) ; et devant Faustus (Actes 26, 9-18). C'est dire l'importance que Luc attache à l'événement.
Cependant il introduit plusieurs variantes :
- Dans Actes 9 : un rôle important est attribué à Ananie, chargé d'introduire Paul dans la communauté chrétienne.
- Dans Actes 22 : Paul distingue deux visions, celle de Damas et celle du Temple, où il reçoit l'ordre de prêcher aux nations païennes.
- Dans Actes 26 : Paul ne parle pas d'Ananie et développe le message reçu sur le chemin de Damas.
Luc n'emploie pas le mot Apôtre pour désigner Paul, alors que celui-ci y tenait beaucoup. C'est que Luc donne de l'apostolat une définition stricte (Actes 1, 21-22), qui englobe le compagnonnage avec Jésus "depuis son baptême par Jean" et le témoignage de la résurrection.
Il y a donc des variantes entre les trois textes, mais tous trois insistent sur le coeur de l'événement : "Je suis Jésus que tu persécutes" : c'est la révélation reçue par Paul. La présence du Christ en son Eglise.
3 - Paul à Damas.
La "rue droite" est aujourd'hui envahie par les souks. On a peine aujourd'hui à imaginer les proportions d'antan : 2 kilomètres de long, 30 mètres de large, bordée de chaque côté de portiques corinthiens. Reste un arc monumental d'époque romaine, un quartier pauvre où habitent de nombreux chrétiens, une crypte qui garde le souvenir de la maison d'Ananie.
Tout de suite Paul se met à prêcher Jésus. Puis il décide d'aller en Arabie (Galates 1, 17), sans doute le territoire à l'Est du Jourdain où sont installées de nombreuses communautés juives. On ne sait rien de ce qu'il y a fait. Peut-être s'est-il rendu indésirable. Il revient à Damas. Le représentant du roi Arétas veut le faire arrêter. Il s'enfuit, descendant le rempart dans une corbeille (2 Corinthiens 11, 30). C'est alors que Paul décide d'aller à Jérusalem "pour faire la connaissance de Céphas" (Galates 1, 18). Le verbe grec employé "historein" s'emploie pour une enquête ou la visite d'un monument ( ! ) La communauté de Jérusalem ne se montre pas très chaude. Heureusement, il y a Barnabé (Actes 9, 26-30). On se débrouille pour l'expédier à Tarse. C'est là que Barnabé ira le chercher en temps utile.
(A suivre, le 16 septembre)