![]()
12 - EN CONCLUSION Voici la dernière séquence de cette "Théologie pour les Nuls" consacrée cette année au sacrement de mariage. Il y aurait encore beaucoup de choses à dire, mais ceci n'est pas un traité. C'est simplement une suite de considérations qui peuvent vous aider à regarder cette institution du mariage avec un peu de recul et d'un oeil neuf. Pour terminer, ces quelques considérations, en vrac. En souhaitant qu'elles vous invitent à chercher, encore et toujours. Soyez curieux et éveillés !
1 - Un peu de droit canon. (Quelques précisions nous ont été proposées récemment par un jeune prêtre spécialiste du droit canon.
Je les ai insérées en italiques)Si vous l'ignorez, le droit canon, c'est la législation de l'Eglise. On l'appelle "canon", ce qui est la traduction d'un mot grec "Kanôn", qui signifie "la règle". Une partie de ce code de droit est consacrée au mariage, bien sûr. Regardons un peu ce qu'il peut nous apprendre.
Il nous apprend d'abord une chose importante, c'est que l'Eglise ne peut légiférer que pour ses membres, c'est-à-dire pour les baptisés. Or, il n'y a pas que les catholiques, ni même les baptisés dans d'autres Eglises chrétiennes, qui se marient, évidemment. L'Eglise, qui n'a donc pas à légiférer pour l'ensemble de l'humanité non-catholique, reconnaît cependant comme valide le mariage de deux personnes quelles qu'elles soient, de quelque religion à laquelle elles appartiennent, ou sans religion, à condition qu'elles se marient selon les normes de la législation du pays dont elles sont les citoyens. Ainsi, un homme et une femme, non baptisés, qui se marient civilement, sont considérés par l'Eglise comme authentiquement mariés. Et s'ils viennent à divorcer et que l'un d'eux veuille se remarier à l'église, c'est impossible sauf si l'un des deux contracte un mariage avec un baptisé catholique, c'est l'application du " privilège paulin " , qui trouve sa source dans la première épître aux Corinthiens (7/ 12-15) . Leur premier mariage est un vrai mariage, aux yeux de l'Eglise. De même, deux protestants qui se marient au temple devant le pasteur sont considérés par l'Eglise comme authentiquement mariés. Les lois de l'Eglise ne s'appliquent qu'aux membres de l'Eglise.
C'est dans la logique des choses. N'oubliez pas ce que je vous ai dit depuis le début. Avant d'être une institution religieuse, le mariage est un simple fait de société. Les premières générations chrétiennes se mariaient sans aucune intervention de l'Eglise. Ils se mariaient "comme tout le monde", c'est-à-dire en adoptant les coutumes et les cérémonies des pays où ils vivaient. Ce n'est que pour mettre un peu d'ordre dans la pagaille qui régnait dans les derniers siècles du premier millénaire (et les premiers siècles du second), que l'Eglise est intervenue pour codifier et réglementer.
Le code de droit canon insiste également sur les conditions absolument nécessaires pour que le mariage soit un acte public. Il faut qu'il y ait une publication des bans. Le mariage ne peut pas être célébré sans la présence de deux témoins et du curé. Il faut que les portes de l'église ne soient pas fermées à clé.
Il y a possibilité d'obtenir des dispenses de ce qu'on appelle "la forme canonique", c'est-à-dire des dispositions formelles précisées pour la célébration du mariage. La plus importante de ces dispenses, que l'évêque accorde facilement, concerne le mariage d'un catholique avec un non-catholique. Exemple : un catholique se marie au temple, devant le pasteur, avec une jeune protestante. L'Eglise peut reconnaître son mariage comme un mariage authentique, moyennant quelques simples formalités.
Les "empêchements" de mariage sont des circonstances tenant à la personne et s'opposant au mariage. Les principaux empêchements sont : l'âge (moins de 16 ans pour les hommes, moins de 14 ans pour les filles) ; l'impuissance (le code, imprécis sur ce point, aurait besoin d'être revu par la médecine) ; l'existence d'un mariage ultérieur non dissous (bigamie) ; l'existence d'une parenté à un degré prohibé ; une disparité de culte (entre catholique et non-baptisé). Plusieurs de ces empêchements sont susceptibles de dispense, moyennant diverses formalités.
Certains mariages peuvent être déclarés nuls par les tribunaux ecclésiastiques. Il ne s'agit pas de divorces, mais d'annulations de mariage. Les raisons de nullité du mariage sont les suivantes:
* Violence ou crainte grave et injuste infligée de l'extérieur. Si par exemple la fille dit au garçon : "Je te préviens, si tu ne m'épouses pas, je me suicide"; je me demande si le mariage peut être valable. De même, s'il y a pression des parents. La démarche des époux doit être totalement libre de toute contrainte.
* Erreur sur la personne du partenaire. J'ai connu ainsi le cas d'une jeune fille qui, quelques semaines après son mariage, s'est aperçu que son mari était criblé de dettes et qu'il l'épousait dans l'espoir que son beau-père pourrait lui servir de caution. Ce n'est qu'un cas. Actuellement, la jurisprudence des tribunaux ecclésiastiques tend à élargir ce chef de nullité.
* Ignorance des rudiments de ce en quoi consiste le mariage. Pour pouvoir se marier, il faut savoir à quoi votre geste vous engage. Une union qui excluerait les propriétés essentielles du mariage (fécondité, indissolubilité, monogamie) ne serait pas valide et donc pourrait être annulée.
* Altération des facultés psychiques. Autrefois, on pensait essentiellement à l'aliénation mentale ou à certaines névroses. Actuellement, on voit plus large. Je vous l'ai déjà dit : les tribunaux ecclésiastiques annulent des mariages pour cause d'immaturité ou défaut de "discernement" empêchant d'assumer l'union conjugale.
Le code de droit canon, qui datait de 1917, définissait le mariage comme un contrat entre un homme et une femme, contrat qui a pour but premier la procréation et l'éducation des enfants, et comme objet second la satisfaction de l'attrait mutuel. Cette définition, purement juridique s'accommode mal de la spiritualité conjugale et de la théologie du mariage qui se sont développées depuis un certain nombre d'années. Le IIe Concile du Vatican définit le mariage comme une "communauté profonde de vie et d'amour" et, en conséquence, a changé l'ordre des buts du mariage, précisant, d'abord, qu'on se marie parce qu'on s'aime, et en seconde position, qu'on se marie pour avoir des enfants. Le code pourra-t-il aller jusqu'à admettre la nullité du mariage conclu sans amour profond ?
(Il y a eu pendant un temps une jurisprudence romaine (tribunal de la rote), qui allait en ce sens, mais l'on a considéré que la notion d'amour était trop subjective, et le pape a demandé qu'on s'en tienne à la définition du canon 1055 § 1 " communauté de vie ".)
2 - Des mariages religieux bidon ? Je me permets de vous recopier de larges extraits d'un article qu'un vieux prêtre lorrain publiait dans son Bulletin Paroissial, il y a quelques années. En voilà un qui n'emploie pas la langue de bois !
"Régulièrement, je lis dans le journal "La Croix" les témoignages de divorcés-remariés qui crient leur douleur de ne pas être admis à recevoir le sacrement de l'eucharistie. Ces divorcés-remariés sont aussi très sévères envers les prêtres qui appliquent sans discernement et sans coeur les lois de l'Eglise.
(Mais il faut aussi inviter les divorcés remariés à deux choses :
1°Lire le discours de Jean-Paul II à Sainte Anne d'Auray, qui affirme qu'ils ne sont pas rejetés de l'Église, qu'ils peuvent même y avoir des responsabilités…(catéchèse par exemple).
2°Rencontrer un avocat ecclésiastique, il y en a dans tous les diocèses, pour voir dans quelle mesure une déclaration de nullité des premiers mariages n'est pas possible, pour pouvoir contracter un nouveau mariage religieux.)
En général, ils trouvent que l'Eglise est injuste envers eux, mais, la mort dans l'âme, ils se soumettent à ses lois, en espérant des temps meilleurs. Moi-même je n'ai pas encore rencontré beaucoup de personnes de cette catégorie. Je pourrais les compter sur les doigts d'une main.
Ceux que je rencontre habituellement ne souffrent pas beaucoup des lois de l'Eglise, ou plutôt, ils n'en tiennent aucun compte. Ils vont communier quand l'occasion se présente, sans demander de permission à personne. Il est vrai que de temps en temps j'apprends que, dans telle paroisse, le curé a renvoyé du banc de communion une personne parce qu'elle est divorcée-remariée
(Le curé n'en a pas le pouvoir, il crée une situation de scandale public qui peut le faire relever de son office, il doit cependant y avoir un dialogue avec la personne qui communie si cela crée un " scandale " dans la paroisse..)
Mais, à ma connaissance, ces cas sont rares. Pour ma part, je ne pourrais jamais refuser la communion à personne. Renvoyer quelqu'un est une humiliation qui me semble contraire à la charité chrétienne. Ce serait autre chose, évidemment, si quelqu'un se présentait en état d'ivresse ou dans une tenue indécente !
Pourquoi ces personnes viennent-elles communier, tout en sachant qu'une loi de l'Eglise le leur interdit ? Parce qu'elles se jugent innocentes. "Ce n'est pas moi qui ai voulu ni provoqué notre divorce, disent-elles. La faute en revient à mon partenaire. Le tribunal l'a d'ailleurs bien précisé. Alors pourquoi devrais-je accepter de l'Eglise une punition que je n'ai pas méritée ?" Ces personnes jugent ensuite que l'Eglise se montre sans coeur en n'acceptant pas que les divorcés se remarient. De fait, l'Eglise ne semble pas se soucier de l'avenir des partenaires séparés.
Prenons une femme sans métier et sans ressources suffisantes, et en plus avec des enfants. Que va-t-elle devenir ? Et s'il se présente pour elle une occasion de refaire sa vie ? Si un autre homme lui promet amour et sécurité ? S'il la prend avec ses enfants ? Doit-elle refuser ? Prenons un homme divorcé. Doit-il reprendre sa vie de célibataire ? Qu'est-ce qui vaut mieux pour lui : dépenser son argent dans les bistrots et aller de déchéance en déchéance, ou bien fonder un nouveau foyer et retrouver un sens pour sa vie ? Voilà des raisons humaines qui conduisent pas mal de divorcés à se remarier et personne ne peut y rester insensible. Une fois remariés, une fois installés dans leur nouveau foyer, ces couples veulent maintenant vivre la vie de tous les autres. Ils ne veulent plus qu'on les montre du doigt. Ils veulent être respectés, même à l'église. Ils pensent avoir le droit d'aller communier comme tout le monde. D'autant plus qu'ils peuvent montrer du doigt ces nombreux autres couples qui vivent dans le concubinage sans être inquiétés par personne, même pas par l'Eglise.
En effet, aucune loi de l'Eglise n'est dirigée contre les concubins. Aucune loi ne leur interdit d'approcher des sacrements. Les divorcés remariés ressentent cela comme une injustice. Enfin, ils n'acceptent pas non plus la clémence de l'Eglise envers les prêtres qui ont quitté leur ministère pour se marier. Ces prêtres avaient pourtant juré fidélité, un peu comme les époux qui se jurent mutuellement fidélité ! Ils ont été infidèles à leurs engagements. Et voilà que l'Eglise les accueille comme une mère et leur accorde le mariage religieux ! (2) Il n'y a que les divorcés-remariés dont l'Eglise ne veut rien savoir. Chers amis, je sais bien que les choses ne sont pas si simples que je viens de les décrire. Je n'ai pas raisonné en théologien, mais en pasteur à l'écoute de son peuple. J'ai prêté ma voix à ceux qui ne savent pas parler. Mais il me semble que certaines modalités du mariage ne sont plus adaptées à notre époque.
(2) - Pourquoi ? Parce que l'engagement au célibat qui se fait lors de l'ordination diaconale n'est pas constitutif du sacrement de l'ordre, c'est une règle de droit ecclésiastique et non une institution de droit divin comme le mariage. Dans les Eglises Orientales des hommes mariés sont appelés au sacerdoce, y compris dans celles qui reconnaissent l'autorité de Rome. De plus l'Église est sévère en ce qui concerne les demandes de relèvement de l'état clérical, et le procès n'est pas une partie de plaisir, l'enquête est difficile et longue. Les jeunes prêtres doivent attendre 10 ans avant de pouvoir demander cette procédure…là encore attention aux idées reçues…la réalité est souvent autre.
oOo Certaines personnes, qui cherchent à se remarier et veulent en même temps être en règle avec l'Eglise, s'adressent au Tribunal ecclésiastique pour obtenir le constat de nullité de leur premier mariage. Je dis bien : constat de nullité. Car le divorce n'existe pas dans l'Eglise. Ceux qui s'adressent donc au Tribunal diocésain sont persuadés que leur premier mariage avait un défaut tellement grave (par exemple non-consommation du mariage, impuissance, manque de liberté, immaturité...) qu'il n'a, en réalité, jamais existé devant Dieu. Leur mariage était nul dès le départ.
Le tribunal examine chaque cas très attentivement. Un dossier est constitué qui est confié à un juge. Le travail ne manque pas à ces juges, s'il faut en croire l'un d'entre eux, qui m'a confié récemment qu'il était surchargé. Pour les cas plus graves le dossier est transmis à Rome. Et ainsi, chaque année, des dizaines de mariages sont déclarés nuls par le tribunal du diocèse, et des centaines, par le tribunal romain, qui fonctionne pour l'Eglise tout entière... Le tribunal du pape est sérieux. Il fonctionne selon des règles bien précises et ne fait de cadeau à personne, même pas aux princesses.
Mais revenons au commun des mortels. Les divorcés qui veulent se remarier ne s'adressent pas, dans leur grande majorité, au tribunal diocésain, pour la bonne raison qu'ils n'ont aucune chance de voir aboutir leur procès. En effet, leur premier mariage ne présente aucun de ces défauts que j'ai cités au début et qui pourraient le rendre nul. Alors ils se remarient civilement. Et pourtant, je suis convaincu que le mariage de beaucoup était nul au départ, même s'il ne peut être déclaré tel par le tribunal diocésain, même s'il ne comportait aucun des défauts mentionnés par le droit canon.
(3) Ils ont tort de ne pas voir un avocat ecclésiastique, qui rompu au droit verra s'il n'y a pas dans la jurisprudence ce qui n'est pas dans le code.
Leur premier mariage avait un défaut bien plus grave : il n'était pas un sacrement. Quand les fiancés se sont mariés à l'église, ils étaient dans des dispositions qui rendaient le sacrement impossible. En effet, celui qui n'est catholique que de nom, qui est baptisé mais n'a jamais fréquenté l'Eglise, est incapable de recevoir le sacrement de mariage. Celui qui n'est pas décidé à rester fidèle à son conjoint pendant toute sa vie est incapable de recevoir le sacrement. Celui qui ne sait pas ce que c'est qu'un sacrement est incapable de le recevoir.
Et ces cas-là sont aujourd'hui très nombreux. Le curé qui prépare le mariage avec les fiancés a beau prendre toutes les précautions, il peut leur faire signer la déclaration d'intention par laquelle ils jurent qu'ils sont libres et veulent s'aimer pour toujours. La plupart des fiancés ne pensent qu'à une chose : obtenir un beau mariage à l'église. Et dans ce but, ils sont prêts à signer n'importe quoi. Je suis donc convaincu que beaucoup de mariages à l'église sont nuls même si le règlement est bien respecté. Mais je suis tout autant convaincu qu'on pourrait éviter ces nombreux mariages nuls et éviter à ces couples, s'ils divorcent et se remarient, de subir les sanctions de l'Eglise. (4) Je vais donc vous proposer une solution.
(4) -Le curé devrait insérer dans le dossier d'enquête canonique ses réserves, secrètement bien entendu, sous enveloppe, cela peut servir au tribunal en cas de demande de déclaration de nullité.
oOo Le droit canon prévoit des empêchements qui rendent nul un mariage religieux. Mais il y a encore bien d'autres empêchements que le droit canon ne prévoit pas ou dont il n'ose pas parler.
Il y a en particulier la non-sacramentalité du mariage. Là où il n'y a pas de sacrement il n'y a pas non plus de mariage religieux. Or il y a actuellement beaucoup de couples qui se trouvent dans une situation où ils sont incapables de recevoir le sacrement. Et je suis conforté dans ma conviction non seulement par mon expérience personnelle, mais par l'avis d'un professeur du Grand Séminaire qui a déclaré il y a quelque temps : "Je suis convaincu que 70% des mariages célébrés à l'église sont nuls."
Pourquoi ces 70% sont-ils nuls ? Seulement à cause de la non-sacramentalité. Seulement voilà : il y a une grosse difficulté sur le plan juridique. Alors que les empêchements prévus par le droit canon sont objectivement repérables et peuvent être détectés par les juges lors d'un procès, l'empêchement de non-sacramentalité relève du domaine de la conscience et est donc subjectif. Personne, sauf Dieu seul, ne peut lire dans les consciences et affirmer avec certitude que tel couple n'a pas reçu le sacrement. Et voici le résultat : 70% des mariages célébrés à l'église sont nuls. Mais devant la loi ils sont considérés comme réguliers. En cas de divorce ou de remariage, ces couples s'attirent les foudres de l'Eglise.
Voilà la solution que je propose. Réserver le mariage religieux aux seuls couples croyants convaincus qui comprennent vraiment ce qu'est le sacrement, qui en éprouvent un véritable besoin et qui sont décidés à en vivre tous les jours. Cette mesure réduirait déjà de plus de la moitié ( et sans doute encore davantage) les mariages célébrés actuellement à l'église et réduirait d'autant le nombre des divorcés remariés éventuels.
Certes, je ne veux pas affirmer par là que tous les couples croyants et pratiquants, célébrant leur mariage à l'église, seront à l'abri de toute infidélité et de tout divorce. Ce serait trop beau. Les chrétiens, malgré l'appui de la foi et des sacrements, sont des êtres humains comme les autres et ne sont pas à l'abri du péché. Mais ce que je veux dire, c'est qu'en réduisant sensiblement le nombre de mariages religieux, on réduira en même temps le nombre de divorcés-remariés interdits de sacrements et l'on réduira sensiblement le nombre de gens qui critiquent l'Eglise pour son incompréhension et sa dureté.
Que faire alors de ces nombreux couples qui, dans mon hypothèse, ne pourraient pas recevoir le sacrement de mariage ? Eh bien, qu'ils se marient civilement. Un mariage civil, conclu avec sincérité, entre deux jeunes qui s'aiment profondément et sont fermement décidés à se rester fidèles est aussi un mariage conclu devant Dieu. En plus, on pourrait donner au mariage civil une solennité bien plus grande que celle qui lui est accordée actuellement dans la plupart des communes.
J'ai assisté il y a quelques années à un mariage civil à Cracovie (Pologne). Les fiancés furent accueillis à la mairie par un groupe de violonistes. La salle des mariages était ornée de belles fleurs, Mme le maire (une dame très distinguée et très bien habillée) accueillit les fiancés avec force sourires et poignées de mains. Elle leur fit un beau discours entrecoupé de morceaux de musique. Et à la sortie, les violonistes étaient de nouveau là pour accompagner le jeune couple dans la salle voisine où leur fut offert un vin d'honneur. Vraiment un beau mariage! A quand chez nous une revalorisation du mariage civil ? Est-il permis de rêver un peu?
En attendant, je ne verrais pas d'inconvénient à ce que le jeune couple, après son mariage civil, vienne en cortège à l'église. Je lui promets une belle fête avec illuminations, fleurs, jeux d'orgue, tapis, avec lecture de la Parole de Dieu, homélie, prières pour le bonheur du couple et finalement avec la bénédiction nuptiale (5). Car quel prêtre pourrait refuser sa bénédiction à un jeune couple qui vient la lui demander ? Seulement il n'y aurait pas de messe et pas de sacrement de mariage, donc pas d'échange des consentements. Pour ne pas créer de confusion avec le sacrement, je déclarerais clairement dans mon homélie que le jeune couple, pour ne pas jouer de comédie, a voulu se contenter du mariage civil et que je respecte sa décision. Que rien n'empêcherait ce jeune couple, si un jour il retrouve la foi et s'il comprend et désire vraiment le sacrement, de se marier à l'église dans le vrai sens du terme. Mais ce deuxième mariage pourrait se dérouler sous une forme plus discrète.
(5) Attention, si nous faisions cela nous entrerions en conflit avec les Eglises orientales rattachées à Rome, car pour ces Eglises, ce n'est pas l'échange des consentements qui est constitutif du sacrement de mariage mais la Bénédiction Nuptiale. Il vaut mieux s'orienter vers une cérémonie où l'on prie pour les jeunes et avec eux, en évitant tout geste ambigu.
Voilà, mes chers amis, ma solution au douloureux problème des divorcés-remariés. Il faut guérir ce problème à la source : endiguer les nombreux mariages religieux bidon. Je suis persuadé qu'il n'y a pas d'autre solution. Il faudrait seulement que la hiérarchie soit d'accord? Mais cela est un autre problème !
A.H.
3 - De l'amour. En terminant ces douze séquences consacrées au mariage, je me dis qu'au fond, même si mon expérience personnelle est riche des confidences de toutes celles et de tous ceux que j'ai rencontrés, je ne peux parler du couple que "comme un aveugle des couleurs". Aussi, pour terminer, j'ai sélectionné quelques textes d'écrivains, de préférence des poètes. Eux seuls, sans doute, peuvent parler de l'amour.
" Tu n'as jamais eu l'oeil assez aigu pour entrer en moi au-delà de ma peau. Il n'y a qu'à te regarder les yeux pour savoir que ce n'est pas vrai. Qu'est-ce que tu peux voir, avec ces yeux-là ? De la chair chaude où tu as envie de mettre la main. C'est tout. Qu'est-ce qui entre en toi quand tu me touches ? Ce chaud, ma peau douce, c'est tout. Tu crois qu'un jour tu pourras entendre un peu le bruit de mon sang ? Jamais de la vie ! Sourd, sourd et sourd...
Tu as les oreilles, les yeux et les mains égoïstes. Tu vois pour toi. Tu regardes. Qu'est-ce que tu vois ? Tu ne vois rien. Tu vois tout ce que ça peut te rapporter comme plaisir. Pas plus."Jean Giono. Le chant du monde. oOo "Dites à votre femme : 'Nous serons pour l'éternité l'un avec l'autre, dans le bonheur total. Ton amour est pour moi au-dessus de tout. Même si je devais tomber dans la pire misère, affronter les pires dangers, souffrir n'importe quoi, tout me sera tolérable tant que mon amour pour toi sera heureux !' Deux êtres unis n'ont rien à craindre des choses et des événements. Avec la paix et l'amour l'homme et la femme sont en possession de tout."
Saint Jean Chrysostome. oOo Adam se tient
Au bord de la source
Sans pressentir
Qu'il ait une image
Pourtant
A peine se penche-t-il
Pour y boire
Eve déjà
Vers ses lèvres se tend.Pierre Emmanuel. oOo Le meilleur moment des amours
N'est pas quand on a dit : je t'aime
Il est dans le silence même
A demi rompu tous les joursIl est dans les intelligences
Promptes et furtives des coeurs
Il est dans les feintes rigueurs
Et les sévères indulgencesIl est dans le frisson du bras
Où se pose la main qui tremble
Dans la page qu'on tourne ensemble
Et que pourtant on ne lit pas.Heure unique où la bouche close
Par la pudeur seule en dit tant !
Où le coeur s'ouvre en éclatant
Tout bas comme un bouton de rose.Où le parfum seul des cheveux
Parait une faveur conquise
Heure de la tendresse exquise
Où les respects sont des aveux.Sully Prud'homme oOo Du peu de mots d'aimer j'ai peine
Qui fait que la phrase me faut
Je ne sais rien voir que mes veines
Et m'est la parole inhumaine
Comme blesse le blé la fauxDu peu de mots d'aimer j'ai doute
De ce qu'est l'amour exprimé
Je suis le mendiant des routes
Personne ma chanson n'écoute
N'entend le peu de mots d'aimerDu peu de mots toujours les mêmes
Qui font semblables les amants
Et plus encore les poèmes
A rougir de dire je t'aime
Comment se contenter commentDu peu de mots d'aimer que faire
Battez les cartes des nuées
Le jeu du ciel ou de l'enfer
A vivre ou mourir ne diffère
Les mots sont des oiseaux tués.Aragon oOo Quand on n'a que l'amour
A s'offrir en partage
Au jour du grand voyage
Qu'est notre grand amourQuand on n'a que l'amour
Mon amour toi et moi
Pour qu'éclatent de joie
Chaque heure et chaque jourQuand on n'a que l'amour
Pour vivre nos promesses
Sans nulle autre richesse
Que d'y croire toujoursQuand on n'a que l'amour
Pour meubler de merveilles
Et couvrir de soleil
La laideur des faubourgsQuand on n'a que l'amour
Pour unique raison
Pour unique chanson
Et unique secoursQuand on n'a que l'amour
Pour habiller matin
Pauvres et malandrins
De manteaux de veloursQuand on n'a que l'amour
A offrir en prière
Pour les maux de la terre
En simple troubadourQuand on n'a que l'amour
A offrir à ceux-là
Dont l'unique combat
Est de chercher le jourQuand on n'a que l'amour
Pour tracer un chemin
Et forcer le destin
A chaque carrefourQuand on n'a que l'amour
Pour parler aux canons
Et rien qu'une chanson
Pour convaincre un tambourAlors sans avoir rien
Que la force d'aimer
Nous aurons dans nos mains,
Amis le monde entier.Jacques Brel.
A vous de continuer...