Évangile de Jésus
Christ selon saint Jean (Jn 16, 12-15)
En ce temps-là, Jésus
disait à ses disciples :
« J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais
pour l’instant vous ne pouvez pas les porter.
Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous
conduira dans la vérité tout entière.
En effet, ce qu’il dira ne viendra pas de lui-même :
mais ce qu’il aura entendu, il le dira ; et ce qui va
venir, il vous le fera connaître.
ui me glorifiera, car il recevra ce qui vient de moi
pour vous le faire connaître.
Tout ce que possède le Père est à moi ;
voilà pourquoi je vous ai dit : L’Esprit reçoit ce qui
vient de moi pour vous le faire connaître. »
oOo
Difficulté
Je me sens bien embarrassé pour
vous parler aujourd’hui de la Sainte Trinité. En effet, quand on
parle de Dieu, on en parle avec des mots d’homme. Il y a donc un
premier décalage entre les mots et la réalité. Par ailleurs, il
s’agit de Dieu. Il ne s’agit pas d’une personne qu’on entend,
qu’on voit, qu’on peut toucher. Dieu, par définition, est
invisible. C’est pourquoi existe, depuis très longtemps, tout un
courant théologique, qu’on appelle la théologie négative, qui
affirme que « de Dieu on ne peut rien dire ». Si on en parle, on
dira toujours quelque chose de très approximatif, voire de faux.
C’est normal. On ne définit pas
Dieu. Pas plus qu’on ne peut définir une personne humaine. Si je
vous demande de me dire qui est Monsieur ou Madame Untel, vous
commencerez par me décrire son aspect physique : c’est un grand
blond, il a des yeux bleus...Si vous allez un peu plus loin, vous
me décrirez un peu son caractère : il est gentil, affectueux, ou,
au contraire, coléreux. Mais déjà là, c’est très délicat, et on
s’aperçoit que ce que l’on dit ne correspond pas tout à fait à la
réalité. Dire tel ou tel trait de caractère, sans nuances, c’est
trop abrupt. Il y a toutes les nuances d’une personnalité. On
risque trop vite de mettre des étiquettes, de classer, donc,
automatiquement, de fausser. Et cela, quand il s’agit d’une
personne humaine. Demandez à un jeune homme de décrire celle qu’il
aime. C’est impossible. Les mots manquent très vite pour dire le
mystère d’une personne humaine, et surtout d’une personne qu’on
aime.
Balbutiements
Aussi, il ne faut pas s’étonner
que l’Eglise ne fasse que balbutier quand elle parle de Dieu.
Alors, elle emploie des images. Nécessairement on est obligé
d’employer des images humaines. On dit : « Dieu est Amour. Dieu
est le Très-Haut. Dieu est l’Eternel ». Ce ne sont que des images.
La Sainte Trinité également, c’est
une image. Il ne s’agit pas, bien sûr, de définir la Trinité comme
« un seul Dieu en trois personnes distinctes et égales ». Ce n’est
pas une information importante pour notre vie. Ca ne dit pas Dieu.
La Trinité, c’est autre chose. Plutôt que d’employer le mot
« personne », je préfère employer le mot « figure », puisque c’est
le même mot grec, et dire que Dieu a trois figures. C’est comme
trois flèches qui indiqueraient trois axes, trois directions
définissant la « personnalité » de Dieu.
Il y a, dans l’Evangile, la
révélation de la Trinité. C’est Jésus qui nous parle de son Père,
de son Esprit. C’est lui qui dit à ses disciples : « Allez,
baptisez au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit ». A travers
cette révélation, la Bible nous dit d’abord que Dieu n’est pas un
« vieux solitaire », « l’éternel célibataire des mondes », comme
disait un poète, mais celui qui est toute relation, toute
communication, toute volonté d’approche, de dialogue, d’amour, de
relation vraie et profonde. D’abord à l’intérieur de lui-même,
mais, comme l’amour a une chaleur communicative, son amour se
répand sur la création tout entière.
Invocations multiples
C’est à peu près tout ce qu’on
peut dire de la Trinité. Je crois qu’on ne peut guère aller plus
loin avec des mots. Heureusement, l’Eglise a d’autres moyens pour
s’exprimer. Et d’abord la liturgie. Sans cesse, elle nous place
sous l’invocation de la Trinité, depuis le premier signe de la
croix qui inaugure toute célébration, en passant par le Kyrie
Eleison, où l’on invoque le Père, le Fils et l’Esprit ; le Gloire
à Dieu, et toutes les prières qui se terminent par l’invocation du
Père, du Fils et de l’Esprit. Dans la Prière Eucharistique, on
demande au Père d’envoyer son Esprit pour que le pain et le vin
deviennent le Corps et le Sang du Christ. Tout, jusqu’au dernier
signe de croix de la bénédiction, est placé sous l’invocation de
la Trinité.
Il y a également la prière
personnelle. Là aussi, il s’agit d’un balbutiement. Nos mots sont
trop petits, trop faibles, pour dire l’Amour. Et au fond,
qu’est-ce que je peux vous communiquer, moi personnellement ?
C’est à chacun de faire la démarche personnelle de l’amour, pour
entrer en relation réelle avec ce Dieu tout proche, qui désire et
suscite la Rencontre.